HISTOIRE DE LA RÉSISTANCE

HISTOIRE DE LA RÉSISTANCE

LES FUSILLÉS DE CHÂTEAUBRIANT

Fusillés en 1941). Des otages exécutés par les nazis

Après l'appel du général de Gaulle, le 18 juin 1940, et la signature de l'armistice, le 22 juin, des Français refusent de se résigner et choisissent de combattre l'Allemagne nazie. L'année 1941 est une année importante pour la Résistance. Les groupes et les réseaux se développent, les attentats et les sabotages se multiplient, tandis que l'attaque allemande contre l'URSS entraîne l'engagement officiel du Parti communiste dans la lutte. Les réactions des Allemands sont de plus en plus violentes. En août 1941, ils décident de fusiller des prisonniers français pour punir les actes de résistance. Les fusillés de Châteaubriant ne sont pas les premiers otages exécutés, mais leur massacre est le point de départ des exécutions massives perpétrées à titre de représailles par l'occupant nazi.

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Détail du monument érigé à la Sablière en hommage aux fusillés de Châteaubriant.

Les dates clé des camps de Châteaubriant (1940-42)

Après la défaite de 1940, les troupes allemandes occupent une partie de la France et parviennent, notamment, en Bretagne.

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Vue aérienne du camp de Choisel.

Le 17 juin 1940, les Allemands entrent dans Châteaubriant, petite ville de 10 000 habitants, située dans la vallée de la Chère. Les soldats faits prisonniers à Nantes et dans les environs sont dirigés sur Châteaubriant et regroupés sur le champ de courses de Choisel.

Quatre camps sont alors créés :

Le camp (A), au moulin Roul, où sont enfermés des tirailleurs sénégalais.

Le camp (B), dans le marais de la Courbetière, où sont rassemblés des prisonniers anglais.

Le camp (S), dans le terrain de sport de la Ville en Bois, où sont détenus des prisonniers venus de Nantes.

Le camp (C), celui de Choisel, le plus important et le mieux organisé.

Fin 1940, quelque 45 000 prisonniers sont internés à Châteaubriant. Le 14 janvier 1941, ils sont transférés en Allemagne. Seul le camp de Choisel va subsister.

Aux anciens prisonniers succèdent des nomades raflés sur les routes et des droits communs puis, à partir de la fin avril, des détenus politiques des deux sexes, anciens dirigeants syndicalistes des Bourses du travail, dirigeants des mouvements du Front Populaire ou des communistes arrêtés par le gouvernement de Vichy.

En octobre 1941, environ 600 personnes sont détenues au camp de Choisel. Extrêmement solidaires les uns des autres, ces prisonniers occupent leurs journées à des activités intellectuelles, organisent des cours de langues, ou effectuent des travaux de jardinage destinés à améliorer l'ordinaire.

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En août 1941, une ordonnance transforme les Français arrêtés en otages. En APPLICATION de cette ordonnance signée par le général Schaumburg, commandant du Gross Paris, plusieurs des détenus du camp de Choisel sont fusillés, notamment les 22 octobre et 15 décembre 1941.

1941 : l'occupant nazi exécute des otages

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Avis publié dans L'oeuvre du 23 août 1941, annonçant que les Français arrêtés sont désormais des otages.

Août 1941 - Les nazis décident d'exécuter un groupe de prisonniers français, désormais considérés comme otages, en représailles de tout acte de résistance. Le 21 août 1941, un soldat allemand, l'aspirant Moser, est abattu à Paris, dans la station de métro Barbès-Rochechouart. Après cet attentat, une ordonnance allemande décrète: A partir du 23 août, tous les Français mis en état d'arrestation sont considérés comme otages. En cas de nouvel acte, un nombre d'otages correspondant à la gravité de l'acte commis sera fusillé. À la mi-octobre 1941, des groupes de résistants armés, dont les membres sont présentés comme des terroristes par les Allemands, programment une série d'opérations à Bordeaux, à Nantes et à Rouen. Ces actions de résistance visent à obliger l'occupant à maintenir des troupes sur l'ensemble du territoire en entretenant un climat d'insécurité, ainsi qu'à développer la lutte armée.

Le 19 octobre 1941, un sabotage provoque le déraillement d'un train sur la ligne Rouen-Le Havre. 20 octobre 1941 - L'officier allemand Holtz est abattu par des résistants, à Nantes.

Le 20 octobre 1941, près de la cathédrale de Nantes, deux jeunes Parisiens, Gilbert Brustlein et Guisco Spartaco, rencontrent sur leur chemin deux officiers allemands, le lieutenant Holtz et le médecin-capitaine Sieger. Ils leur emboîtent le pas. Au moment de TIRER, l'arme de Spartaco s'enraye, mais le revolver de Brustlein atteint Holtz qui s'effondre.

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L'intérieur du camp de Choisel, juillet 1941.

La réaction de l'occupant nazi est immédiate : à Châteaubriant, une commune située à environ 70 km de Nantes, des troupes allemandes viennent renforcer la gendarmerie française qui assure la garde du camp de Choisel. Un officier allemand se présente au camp pour y consulter la liste des prisonniers. La majorité d'entre eux sont des détenus politiques arrêtés par le gouvernement du maréchal Pétain. 21 octobre 1941 - Les nazis annoncent l'exécution de cinquante otages, en représailles de la mort de l'officier allemand Holtz.

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Guy Môquet, photographié en compagnie de sa mère et de son frère, Serge, en visite à Châteaubriant. A dix-sept ans, il est le plus jeune des otages fusillés le 22 octobre 1941.

Le 21 octobre 1941, le général Von Stülpnagel, commandant militaire en France, annonce par voie d'affiche :

En expiation de ce crime, j'ai ordonné préalablement de faire fusiller cinquante otages  cinquante autres otages seront fusillés au cas où les coupables ne sont pas arrêtés d'ici le 23 octobre 1941, à minuit. J'offre une récompense  de quinze millions de francs aux habitants du pays qui contribueraient à la découverte du coupable.

Le choix des otages est laissé à la discrétion du gouvernement de Vichy. Les Allemands présentent au ministre de l'intérieur, Pierre Pucheu, une liste de cent détenus. Les noms de cinquante personnes sont retenus, essentiellement des communistes. L'exécution du premier groupe d'otages se prépare.

Le 21 octobre 1941, à Bordeaux, un autre officier allemand, le conseiller d'administration militaire Reimers, est abattu par Pierre Rebière.

La riposte des autorités allemandes est la même : cinquante otages fusillés, cinquante otages en sursis jusqu'à l'arrestation des coupables, une récompense de quinze millions de francs offerte aux dénonciateurs. 22 octobre 1941 - Les nazis exécutent quarante huit otages français, dont vingt-sept à Châteaubriant, en représailles de la mort de l'officier allemand Holtz. Le mercredi 22 octobre, en début d'après-midi, les Allemands regroupent à Châteaubriant, au camp de Choisel, vingt-sept otages. Dans une baraque du camp, ils peuvent écrire une dernière lettre, avant d'être conduits à la carrière de la Sablière, située à la sortie de la ville, pour y être exécutés.Leur exécution se déroule en trois salves, à 15 h 50, 16 h 00 et 16 h 10. Tous refusent d'avoir les yeux bandés et les mains liées. Ils meurent en chantant la Marseillaise.

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La liste des quarante-huit otages fusillés est publiée dans L'oeuvre du 23 octobre 1941

Ce jour-là, d'autres otages sont également exécutés à titre de représailles : seize au champ de TIR du Bêle, à Nantes, et cinq au fort du Mont-Valérien. Le 22 octobre au soir, dans son discours à la radio, le maréchal Pétain ne prononce aucune condamnation de ces exécutions et dénonce, au contraire, les auteurs d'attentats et enjoint aux Français de se dresser contre eux, en les poussant à la délation : Par l'armistice, nous avons déposé les armes. Nous n'avons plus le droit de les reprendre pour frapper les Allemands dans le dos. Aidez la justice. Je vous jette ce cri d'une voix brisée : ne laissez plus faire de mal à la France.

23 octobre 1941 - Les Allemands dispersent les vingt-sept corps des fusillés de Châteaubriant dans neuf cimetières des environs. Le 23 octobre, le secrétariat général à l'information diffuse un communiqué destiné à apaiser les esprits : Il est établi que les autorités occupantes ne choisissent pas les otages destinés à être exécutés parmi les personnes arrêtées après un attentat, mais parmi les suspects internés dont la culpabilité a été nettement prouvée. 24 octobre 1941 - Les nazis exécutent un autre groupe de cinquante otages, en représailles de la mort de l'officier allemand Reimers.

Le 24 octobre, cinquante otages sont fusillés à Souges, près de Bordeaux, à la suite de l'attentat du 21 octobre contre le conseiller militaire Reimers.

Dans le même temps, le maréchal Pétain propose de se livrer lui-même aux Allemands comme otage. Rencontrant l'opposition de ses ministres, il renonce à son projet et Pierre Pucheu est chargé de négocier avec les autorités d'occupation.

Les Allemands menacent de fusiller de nouveaux otages si les coupables ne sont pas découverts, mais l'offre de récompense pour la dénonciation des auteurs de l'attentat ne porte pas ses fruits. Stülpnagel essaie alors d'amener les Français à coopérer et promet aux familles qui apporteront leur concours la libération des détenus en Allemagne et le retour des prisonniers dans leur foyer. Au terme de ses tractations avec les autorités de Vichy, Stülpnagel renonce finalement aux exécutions complémentaires.

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Cérémonie clandestine à la Sablière : bravant l'interdiction des Allemands, la population de Châteaubriant vient rendre hommage aux fusillés, 1943.

26 octobre 1941 - La population rend un hommage clandestin aux fusillés de Châteaubriant. Malgré les interdictions, la population de Châteaubriant et de ses alentours se rend à la carrière de la Sablière le dimanche suivant l'exécution des otages, pour déposer des fleurs à l'emplacement des neuf poteaux d'exécution. Alors que l'autorité allemande pensait faire de la fusillade de Châteaubriant un exemple, elle obtient l'effet inverse.

Partout, cette exécution suscite l'indignation et la colère. Elle frappe de manière irréversible la conscience des habitants de la région et l'ensemble de la population française, et joue un rôle important dans la mobilisation des énergies pour combattre l'occupant nazi. Son retentissement est considérable dans le pays comme à l'extérieur. Janvier 1942 - Publication du poème de Pierre Seghers, en hommage aux otages exécutés par l'occupant nazi.

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Monument érigé à la Sablière en hommage aux fusillés de Châteaubriant.

Mai 1942 - Fermeture du camp de Choisel. À la suite de plusieurs évasions, le camp de Choisel ferme le 9 mai 1942 et les prisonniers sont transférés vers Voves et Aincourt.

Les Résistants de la Vienne fusillés au Mont-Valérien (92) Suresnes

Après la victoire militaire allemande en juin 1940, Hitler choisit de traiter avec un gouvernement français plutôt que d’imposer lui-même directement sa domination. Le Maréchal Pétain et son gouvernement offrent ainsi au Führer cette opportunité qui garantit une occupation paisible de l’armée nazie engagée d’autre part sur ses objectifs militaires contre l’Angleterre et l’URSS.

 Pétain souhaitant reconstruire une nouvelle France selon les principes de la révolution nationale et suivant les conditions de l’armistice du 22 juin 1940, accepte de collaborer avec l’occupant pour lutter contre les Français qui reprendraient le combat.

Dès l’été 1940, les nazis répriment durement les Résistants qui s’attaquent aux troupes d’occupation : 14 exécutions de juin 1940 à mai 1941. Soulignons toutefois que les Allemands préfèrent laisser à Vichy la responsabilité de la répression à la fois pour des raisons d’efficacité mais aussi pour éviter d’assumer l’impopularité de cette répression ressentie par la population.  Au cours de l’été 1941, après l’invasion allemande de l’Union Soviétique le 22 juin 1941, débute la nouvelle stratégie de lutte armée des communistes en France avec la multiplication des attentats contre l’armée allemande. L’occupant nazi, sur ordre de Hitler réagit immédiatement : des otages seront exécutés dans le but de venger les morts et d’intimider la population française. Berlin réclame l’exécution de 100 otages pour un allemand tué. Commencent alors les massacres d’otages choisis parmi les communistes et les juifs (désignés par Hitler comme responsables du complot judéo-communiste). Et les étrangers. Soulignons également que l’un des premiers agents secrets envoyés par de Gaulle en Bretagne pour organiser le réseau Nemrod, Louis Honoré d’Estienne d’Orves sera fusillé au Mont-Valérien le 29 août 1941 avec trois de ses compagnons : Jan-Van Louis Doornik officier d’origine hollandaise, Maurice Barlier et Maurice Noël officiers de carrière. Suivront les exécutions d’agents des réseaux de renseignement comme Charles Deguy, Roger Pironneau, Gustave Bonhomme, Stéphane Hampel, Etienne Champion et tant d’autres qui ont payé de leur vie leur engagement pour la libération de la France et la lutte pour la liberté. Le 22 octobre 1941, à Châteaubriant, à Nantes et à Paris, 48 otages sont fusillés. Le 24 octobre, 50 le seront à Souges près de Bordeaux, puis 95 dont 70 au Mont-Valérien à Suresnes et 25 en province. Vichy radicalise son régime avec sa loi du 14 août 1941.

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Affiche du 14 août 1941). 
 
Loi antidatée qui permet de punir de façon rétroactive les communistes qui pourront de fait être jugés et fusillés pour un acte commis avant la promulgation de cette loi. Sont instituées en même temps des sections spéciales qui peuvent condamner à mort et cela sans possibilité de faire appel. Cette loi se double à la même date d’une puissante campagne de propagande du commandement militaire allemand en France qui diffuse, à grands renforts d’affiches Des menaces de condamnation à mort à l’encontre de toute personne qui se livre à une activité communiste ou qui la soutient. Vichy accepte de participer à la désignation des otages, engagement qui tient à la nature répressive du gouvernement de Pétain, à son anticommunisme et son antisémitisme. Ainsi les tribunaux allemands avec la collaboration active de Vichy et de sa police vont condamner à mort et fusiller des milliers de Résistants en France. Dans la Vienne, 128 seront exécutés à La Butte de Biard. Le 18 août 1940, huit syndicalistes CGT des usines Renault de Boulogne-Billancourt seront les premiers fusillés du Mont-Valérien. Jusqu’au 9 juin 1944, 1006 résistants pour la plus grande part communistes, français et étrangers, seront passés par les armes de la répression nazie (ce nombre de 1006 établi avec certitude pouvant être en dessous de la réalité, certaines sources avançant le chiffre de 4000 victimes).

Huit Résistants de la Vienne ont été fusillés au Mont-Valérien :

Le 15 décembre 1941 : Daniel Perdrige, 36 ans, domicilié à Châtellerault, ancien maire de Montfermeil, interné à la prison du Cherche-Midi puis d’Alincourt et au camp de Compiègne est exécuté au Mont-Valérien. Sa sœur Charlotte Perdrigé membre de l’intelligence service, arrêtée à Paris, sera déportée.

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Marcel et Louise Lavigne 

Le 21 septembre 1942 : Domicilié à Poitiers, monteur-électricien, résistant engagé dans les rangs du Front National de Libération de la France, auteur entre autres actions de l’évasion de 4 résistants détenus au camp d’internement de Rouillé, est arrêté le 25 mars 1942 de même que sa femme Louise Lavigne qui sera déportée et décédera à Auschwitz. Marcel Lavigne est exécuté avec 45 de ses camarades au Mont-Valérien le 21 septembre 1942. René Amand, frère de Louise Lavigne arrêté le 23 juin 1941 sera déporté à Auschwitz le 6 juillet1942 où il décédera le 15 novembre 1942.

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Jacques Delaunay (à droite sur la photo), Marc Delaunay (2ème en partant de la droite), Jacques Massias (au centre) et Eloi Rieckert (4ème en partant de la droite), tous membres du groupe FTP Tullius  qui organisait des sabotages de voies ferrées, sont arrêtés. Condamnés par le Tribunal d’Etat Français à des peines de prison, les nazis considérant ce jugement laxiste les condamnent à mort. Les 4 étudiants résistants sont fusillés le 6 octobre 1943 au Mont-Valérien. J. Gautier (1er à gauche) a été relâché.

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Le 21 février 1944, Spartaco Fontano

Est exécuté au Mont-Valérien avec 22 résistants de la M.O.I (main- d’œuvre immigrée) du groupe Manouchian Spartaco FONTANO était le cousin des deux frères Nerone Fontano fusillé à la Butte de Biard), et de Jacques Fontano massacré par les nazis à Vaugeton (Celle l’Evescault). Ils étaient d’origine italienne, nés à Trieste et antifascistes.

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Cloche portant gravés les noms des 1006 fusillés.

Le 24 mars 1944 : Paul Quillet (alias Penot dans la Résistance), fils de commerçants de Châtellerault, réfractaire au STO (service du travail obligatoire en Allemagne), s’engage dans les FTPF de la région parisienne en août 1943. Nommé commissaire aux opérations contre l’armée nazie auxquelles il a participé avec courage, il est arrêté le 18 novembre 1943, interné à Fresnes, condamné à mort par un tribunal allemand le 16 mars 1943 et fusillé au Mont-Valérien le 24 mars 1944. Il allait avoir 22 ans. Comme dans l’ensemble du pays, le département de la Vienne compte parmi les fusillés du Mont-Valérien des résistants français et étrangers. Ils ont péri sous le coup de ce mot terrible d’un procureur français des tribunaux spéciaux : Vous êtes communiste, étranger et juif, trois raisons pour que je demande la peine de mort contre vous. Face à cette barbarie, ils sont morts debout au nom d’un idéal qui refuse la servitude.  Par décision du Général de Gaulle, le Mont-Valérien est devenu le Mémorial de la France Combattante. Ce mémorial a été inauguré le 18 juin 1960 par le président de Gaulle qui a décidé que le dernier résistant de la France Libre serait inhumé sur le lieu de cette tragédie.

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25/08/2014
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