LES FEMMES DANS LA RÉSISTANCE
Pourquoi les femmes ont-elles participées à la Résistance
Comme tous les Français, après un abattement consécutif à la défaite, les femmes ont réagi : d'abord tentées de faire confiance au maréchal Pétain qui promettait le retour des prisonniers et qui voulait relever la France par une révolution nationale honorant notamment la famille (thème auquel les femmes étaient particulièrement sensibles), elles se sont ensuite rendues à ce qui devenait l'évidence. Le patriotisme les rendait d'abord spécialement sensibles à l'humiliation de la nation. De plus, elles étaient souvent indignées devant les rigueurs de l'occupation telles que la suppression des libertés d'aller et de venir, de communiquer, d'exprimer son opinion ; les persécutions raciales, les violences policières (les miliciens français étant souvent encore plus violents que les Feldgendarmes). Enfin, elles refusaient, pour certaines d'entre elles du moins, le régime politique de Vichy. Mais les femmes sont principalement arrivées dans la résistance du fait de l'absence de leurs maris qu'elles devaient remplacer aux champs, au bureau, à l'usine et à la maison. En outre, l'idée que leur époux était parqué au loin dans des endroits secrets leur était insupportable. De même, leur sensibilité à l'injustice et aux inégalités les poussait à réagir fortement. Un autre point important de la présence des femmes dans la résistance : la responsabilité du ravitaillement des familles. En effet, elles subissaient plus que quiconque les contraintes de la pénurie et du rationnement, par exemple les files d'attente interminables devant les magasins mal approvisionnés, la paperasserie des tickets de rationnement, ou bien encore la recherche incessante et épuisante de nourriture en dehors des circuits officiels (marché noir). Elles étaient scandalisées en voyant les magasins juifs accaparés par des administrateurs abusant de la situation et des soldats allemands se servir partout à n'importe quel prix au moyen de liasses de billets neufs. Il faut enfin souligner, en plus de ces activités fatigantes, le travail domestique et le travail dans les champs en l'absence du mari. Ainsi fortement motivées, les femmes ont ignoré plus que les hommes les clivages sociaux ou politiques qui étaient parfois des sources d'incompréhension ou de méfiance entre militants : venues de divers milieux, elles dépassaient leurs différences pour une même cause.
Comment les femmes ont-elles participé à la Résistance
La montée en puissance de la résistance fut évidemment progressive. Dans les premiers temps de l'occupation. Au début de l'occupation, les femmes prirent d'abord des initiatives personnelles, spontanées et de ce fait désordonnées. Mais déjà ces premières ACTIONS témoignèrent du refus de l'occupant. Il pouvait s'agir de menus sabotages, de récupération d'armes et de munitions appartenant à la Wehrmacht, graffitis. Dès cette époque, les femmes commencèrent à avoir des rôles spécifiques et parfois très importants : même si ce fut un rôle marginal des femmes, il faut noter que dès le 18 juin et l'appel du général de Gaulle, des femmes prirent part directement ou non au combat : elles servirent comme secrétaires, conductrices, infirmières, pilotes d'avions de liaison. Elles eurent également un rôle d'assistance sur les champs de combat (mission qui peut paraître secondaire mais ô combien nécessaire). Ainsi partagèrent-elles les risques des soldats sur tous les fronts de la France libre (Lybie, Tunisie, Italie). Les femmes menèrent en outre des actions dangereuses qu'elles payaient parfois de leur vie : agents secrets, elles furent parachutés ne France pour participer à la résistance (ou à la susciter). Les femmes travaillèrent pour les réseaux et bureaux de renseignements (S.O.E. à Londres, B.C.R.A. de la France Libre). Du fait du statut de ménagères qu'on leur prêtait à l'époque, les femmes furent confrontées directement aux conséquences de la présence allemande, notamment la pénurie alimentaire. Ainsi, dès la fin de 1940, alors que s'aggravent les difficultés du ravitaillement, elles manifestèrent leur protestation contre la famine. Elles montrèrent aussi leur opposition face aux prélèvements de la production française par l'ennemi (charbon dans les mines du Nord, usines Michelin à Clermont-Ferrand. Les premiers rassemblements aboutirent à l'organisation de groupes de protestation qui manifestaient à Paris, Montpellier ou Marseille. Ces comités diffusèrent de journaux clandestins avec les moyens du bord. A la même époque, des tracts étaient rédigés et distribués par les étudiantes. C'est sur la base de ces premiers groupes que se créent les mouvements de résistance, chacun diffusant un journal spécifique. Les plus importants mouvements sont localisés :
À Clermont-Ferrand : Libération Sud avec Lucie Aubrac. À Lyon : Combat, avec Bertie Albrecht. À Paris : Défense de la France avec Hélène Viannay ; Musée de l'Homme avec Germaine Tillions et Agnès Humbert. A partir de 1941 : des mouvements plus structurés. A partir de 1941, les principaux mouvements de résistance et les réseaux de renseignement, d'action et d'évasion se constituent en organisations structurées. La PARTICIPATION des femmes s'accroît. Elles restent ou deviennent responsables dans les mouvements (Bertie Albrecht, Madeleine Braun). Elles continuent de jouer un rôle important voire irremplaçable sur le terrain : secrétariat, hébergement de personnes en situation irrégulière, fabrication de faux-papiers et participation aux filières d'évasion. 1942-1943 : la Résistance s'amplifie.
La collecte et la transmission de renseignements militaires
Au sein de différents réseaux (B.C.R.A., S.O.E., F2), beaucoup de renseignements d'intérêt militaire ou économique sont collectés et transmis par radio. Chaque jour, des milliers de messages radio transmettent les renseignements demandés par Londres ou Alger. Dans ce domaine, les femmes rendent d'immenses services ; elles se rendent aussi utiles pour la recherche et le balisage de terrains d'atterrissage et de parachutage.
Participation aux attentats La participation des femmes aux attentats de toutes sortes était particulièrement recherchée : il s'agissait du transport d'armes, de guet. Peu à peu les attentats contre des objectifs militaires devinrent quotidiens. La presse clandestine. Les femmes jouèrent un rôle important dans le développement de la presse clandestine dont le tirage se chiffre en 1943 par centaines de milliers d'exemplaires. Elles furent à la tête de plusieurs journaux clandestins. Logistique des mouvements de Résistance Les femmes occupent une place notable dans la logistique des mouvements de résistance, c'est-à-dire tout ce qui a trait au financement, au ravitaillement des groupes de résistance, du maquis et à la fabrication de fausses pièces d'identité. Beaucoup de femmes s'engagent et se dévouent sans compter dans les relais d'évasion qui nécessitent secrétaires, agents de liaison et guides. Ravitaillement, assistance sanitaire et sociale. Même si la répression nazie provoque de nombreuses disparitions parmi les résistants, ces vides sont remplis par les réfractaires au S.T.O. massés dans le maquis. Cette affluence provoque des problèmes d'encadrement, que les femmes contribuent çà résoudre. Elles rendent aussi de très grands services dans le ravitaillement et l'assistance sanitaire et sociale (fourniture de denrées alimentaires par les cultivatrices, réseaux d'alerte au voisinage des camps). Toutes ces actions ont été menées par des membres de la résistance organisée, mais aussi par tous ceux et toutes celles qui, sans avoir appartenu aux réseaux, leur ont prêté occasionnellement assistance. 1944 : la libération de la France. Les F.F.I. deviennent en 1944 une véritable armée combattant au grand jour, contribuant largement, avec l'aide des alliés, à la libération de la France : batailles sur de nombreux points stratégiques (Saint Marcel). Embuscades et sabotages freinent les mouvements ennemis. Éclairage et renseignement des armées alliées. Libération de nombreuses villes et d'une grande partie du territoire. Les femmes appartenant aux unités combattantes prennent part à ces actions, par lesquelles elles reçoivent l'aide d'infirmières et d'ambulancières. Elles s'attachent particulièrement à la libération des camps de déportation. Enfin, elles participeront activement à la renaissance de l'administration au sein des comités départementaux de libération et des municipalités.
Allamigeon Cécile - Allamigeon Guillemette
A la fin des années 30, le père Dieuzaide espère que le rôle de la femme puisse apporter un renouveau de la société. Pour promouvoir cette option il va fonder le cercle Marie Gimet, dans l'esprit de l'association catholique de la jeunesse étudiante et lycéennes. Ce cercle est animé par Germaine Ploux mais aussi par les sœurs Allamigeon qui sont alors élèves du lycée de jeunes filles de Bordeaux. Les réunions se tiendront tous les jeudi après-midi, aux 38 rues Huguerie. Dès octobre 1940, le père Dieuzaide est contacté par le futur colonel Olivier, transfuge du service de renseignements de Vichy. Ce sera la création du réseau Jade-Amicol. Proches du père Dieuzaide, les soeurs Allamigeon vont le suivre très rapidement. Secrétaire de direction de la compagnie des tramways électriques et omnibus de Bordeaux, Cécile Allamigeon est une proche collaboratrice de Pierre Moniot, ingénieur en chef de la compagnie. Elle va permettre le recrutement de celui-ci qui deviendra chef de secteur de ce réseau. Le domicile des soeurs Allamigeon va servir de maison de refuge et de rencontre. Elles abriteront le chef du réseau jusqu'au début de 1942. Cécile fut à la fois secrétaire de Pierre Moniot et agent de liaison. Les deux sœurs durent quitter précipitamment Bordeaux, dans le sillage de Pierre Moniot, le 23 septembre 1943, la Gestapo sur les talons. Cécile rejoignit son chef, Pierre Moniot, à l'état-major du réseau, à Paris. Guillemette, quant à elle, assura les travaux de secrétariat et de renseignements.
René Antoine et Hélène Antoine
Antoine René est né le 21 juin 1904 à Bordeaux. Ajusteur mécanicien à la S.N.C.A.S.O Bacalan il est fiché, à 36 ans, comme vieux communistes. Le commissaire Poinsot a placé ses indicateurs dans tous les milieux propices à la Résistance. Le dénommé Pierre Giret, ancien résistant retourné, met en cause Antoine René, qu'il sait pouvoir hébergé des individus dans l'illégalité. La femme Giret, interrogée le 13 août 1942, dénonce la famille Antoine qui a su l'héberger alors qu'elle venait de s'évader de l'Hôpital Saint-André. Elle rapporte les propos tenus par le jeune Michel Antoine, âgé de dix ans et qui affirmait que son père avait caché des revolvers. Pour compléter ce déballage, elle ajoute que la mère Hélène Antoine avait reconnu que des armes, des bombes et des pièces détachées de mitrailleuses seraient également cachée, sous sa garde. Toute la famille Antoine est arrêtée le 26 août 1942, par la police française. René Antoine sera fusillé les 21 septembres 1942, à Souge, par les autorités d'occupation, après avoir subi les interrogatoires répétés des policiers du commissaire Poinsot.
Henry Belmas et Mélie Belmas
Les époux Balmas, habitant Eysines, mirent leur domicile à la disposition du réseau comme refuge et maison de rencontre Ils hébergèrent ainsi Philippe. Leur maison servit encore pour les émissions radios. Madame Balmas était une femme très intelligente et énergique, aux réactions parfaites en face du péril. En juillet 1943 une grosse alerte se produisit. La Gestapo, en cours de recherche, s'était arrêtée devant la porte de la maison où nos radios étaient en train d'opérer. Placée en observation, madame Balmas eut le temps de prévenir à temps Phil et Seifert qui déménagèrent leur matériel et s'enfuirent. Puis, très maîtresse d'elle-même, madame Balmas s'enquit tranquillement, auprès des Allemands, de l'objet de leurs recherches avant de leur indiquer la direction à prendre. Le drame était évité. Les époux Balmas durent, eux aussi, quitter Bordeaux précipitamment. Ils rejoignirent Pierre Moniot à l'Etat major de Paris.
Cette Arcachonnaise qui, bien avant guerre, avait fait de sa boutique, face à la mairie, un lieu de rencontre des esprits progressistes, en fit, dès 1940, une étape pour les résistants. Elle fut à l'origine du premier groupe O.C.M. et eut des responsabilités au réseau Jove. Née le 10 septembre 1893 à Albi, dans le Tarn où son père, officier, se trouvait en garnison; il disparut bientôt, et la jeune orpheline, vint, au début du siècle, avec sa mère et son jeune frère, s'installer à Saint-André-de-Cubzac. En possession du Brevet supérieur, elle est embauchée à la Lloyds and National Provincial Bank d'abord à Paris, puis à Bordeaux La précarité de la santé de sa mère l'oblige à démissionner pour revenir à Arcachon et se lancer dans la mercerie après avoir fait l'acquisition d'un petit commerce, place de la Mairie, à l'enseigne au Bonheur des Dames. En août 1940, Marie Bartette a quitté son emploi dans une banque anglaise de Bordeaux pour venir rejoindre sa mère, veuve et malade, à Arcachon, où elle a acheté une petite mercerie, s'appelant Au bonheur des dames, située 12, place de la Mairie. Fille d'officier, elle refuse d'admettre la défaite, soutenue par quelques amis sûrs, parmi lesquels l'instituteur Robert Duchez, un séminariste Jean Brunet, André Réaux et André Lesclaux, tous deux employés des postes, et le jeune André Perdrillat, âgé de dix-neuf ans. Il est à noter que l'instituteur Duchez et l'abbé Brunet se retrouvaient côte à côte après s'être affrontés durant de longues années. Au début, l'activité clandestine du petit groupe se borne à l'élaboration et à la diffusion de tracts de fortune. Fin 1940, il est décidé de fabriquer dix mille croix de Lorraine, découpées dans du papier, et de les répandre dans les principales artères de la ville, dans la nuit de la Saint-sylvestre. Au petit matin, les Allemands ne peuvent que contempler le spectacle, avec d'autant plus de colère que le vent a accumulé un grand nombre de ces croix jusque devant la Kommandantur, où règne le capitaine Schumacker. Si beaucoup d'Arcachonnais s'imaginent que ces croix ont été lancées par avion pendant la nuit, les Allemands, eux, ne s'y trompent pas.
Modèles de tracts concoctés par Robert Duchez:
Après le sombre orage Vient le soldat d'été Après notre esclavage Viendra la liberté.
La Grèce bout, le macaroni file Les Fritz sont cuits.
Pour chasser le vert de gris. Le brillant de Gaulle.
Peu à peu, de nouveaux membres sont recrutés, l'abbé Brunet touchant les milieux de droite, tandis que Robert Duchez se tourne, lui, vers les milieux de gauche, aidé en cela par Réaux et Lesclaux, tous deux militants de la S.F.I.O. Un jour de l'été 1941, par l'intermédiaire du jeune André Perdrillat le groupe entre en contact avec un certain Robert Blanc, parisien réfugié à Arcachon, et qui n'est autre que le commandant parachutiste Richard, chef de mission en France. En juillet le commandant Richard doit quitter précipitamment Arcachon, laissant le groupe sans la moindre liaison. Isolé, le groupe essaie de prendre avec une autre équipe arcachonnaise, dirigée par Raymond Marty. Celui-ci, sous couvert d'une antenne locale des Amis du Maréchal, dirige, en fait, un service de renseignements travaillant pour l'Intelligence Service. Le rapprochement ne se fera pas. Le groupe Duchez-Bartette veut impérativement rester sous la bannière gaulliste. En février 1942, le groupe passera sous le commandement d'Edouard de Luze, propriétaire au Moulleau. Sous son impulsion, le groupe se projettera au-delà d'Arcachon, sur le pourtour du bassin. Marie Bartette fut arrêtée le 30 juin 1944 et interrogée par le lieutenant Dhose. Elle passa des cachots du Fort du Hâ à ceux du Bouscat, siège de la Gestapo; ensuite, ce fut Dachau puis Ravensbrück. Libérée par mes troupes américaines, elle revint à Arcachon fin mai 1945. Marie Bartette s'éteignit les 27 novembres 1961, à Saint Sèverin en Charente.
Joseph Raymond Bierge est né les 5 septembres 1912, à Cenon. Ouvrier charpentier traceur hautement qualifié, Il participe très tôt à la vie syndicale. Le combat que Franco va livrer à la jeune république espagnole ne le laisse pas indifférent. Joseph Bierge va organiser collecte d'argent, de vêtements, de vivres. Ces vivres, auxquels il va rajouter du lait concentré pour les nourrissons, sont rassemblés sur les quais, près des Quinconces et chargés sur des camions pour être acheminés vers l'Espagne. Le gouvernement du Front Populaire décide le développement des usines d'aviation. Bierge Joseph est embauché à l'usine de Bègles. Après la grève du 30 novembre 1938, il adhère au parti communiste. Entré dans l'illégalité après la dissolution du parti, sa maison de Villenave d'Ornon SERT de relais aux responsables illégaux. Vient ensuite l'installation d'un petit atelier d'imprimerie où deux Gestetner imprimeront chaque soir journaux et tracts qui seront diffusés dans les usines et dans les localités. Cette responsabilité le conduira à prendre contact avec les responsables départementaux. Arrêté le 30 juillet 1942, restera aux mains du commissaire Poinsot durant cinquante jours. Sévices, tortures. Il sera fusillé le 21 septembre 1942, au camp militaire de Souge.
Félicienne Bierge, née Pinto, a vu le jour en 1914, en Espagne. Mariée ; à Joseph Bierge en 1936. Félicienne Bierge a été l'agent de liaison de René Michel, fusillé en 1943 après avoir appartenu à un groupe F.T.P de l'aviation à Bègles. Elle devient l'agent de liaison de Raymond Rabeaux qui assume la responsabilité inter régionale de Nantes et de la Rochelle. Par ailleurs, Félicienne doit ravitailler en armes les groupes F.T.P. de la Gironde. Victime du traître Giret, elle sera arrêtée et déportée. Départ dans le convoi du 21 janvier 1943. Arrivée à Auschwitz sous le matricule 31734, elle connaîtra Ravensbrück, Mauthausen avant de revenir à Bordeaux. Elle est décédée le 1er janvier 1996.
Alice Cailbault, née Gardelle à Paris en 1906, est une femme de prisonnier. Agricultrice et amie de Marguerite Valina, elle abritera à la ferme les résistants recherchés. Arrêtée, Alice Cailbault fait partie du convoi du 21 janvier 1943, en direction d'Auschwitz où elle décèdera dans le courant de mars 1943, sous le matricule n°31738.
Née le 6 octobre 1905 à Sainte-Foy-la-Grande, où ses parents étaient employés d'épicerie, elle est allée à l'école jusqu'au certificat d'études puis, elle a appris la couture. Elle était vestonniaire giletière. Elle se marie en 1930 avec Robert Bret, ouvrier aux ateliers des tramways de Bordeaux, militant communiste. Robert Bret est arrêté le 22 novembre 1940. Il était déjà membre d'une organisation clandestine d'où allait sortir l'Organisation spéciale de sabotage, puis les F.T.P. Après l'arrestation de son mari, Georgette continue à cacher du matériel de propagande, à le transmettre. Son mari est fusillé le 24 octobre 1941 à Souge. Elle n'interrompt rien de son activité. Tout de même, en juillet 1942, quand elle voit tomber aux mains de Poinsot les camarades de son groupe, elle quitte Bordeaux pour aller à Dax, chez sa soeur. La cachette n'est pas assez secrète: Poinsot l'y trouve et l'arrête, le 23 août 1942. Fort du Hâ jusqu'au 14 octobre 1942: Romainville jusqu'au départ. Auschwitz matricule n° 31.747. Elle est morte le 20 mai 1943. C'est dire qu'elle a tenu longtemps, et avec une peine difficile à décrire car, peu avant son arrestation, elle avait été opérée de verrues plantaires. Faute de soins en prison, les plaies s'étaient mal cicatrisées, la marche vers les marais, l'appel, lui coûtaient insupportablement. A Birkenau, on était debout seize heures par jour. Elle a tenu. C'est à fin avril que l'épidémie de typhus a atteint son intensité la plus haute. Elle a eu le typhus, elle a dû entrer au revier. Elle a résisté aux neuf premiers jours de fièvre. Ses camarades la croyaient sauvée. Une rechute de typhus l'emporta.
Germaine Cantelaube, couturière de son état, fut arrêtée pour faits de Résistance. Elle fut déportée à Auschwitz, par le convoi du 21 janvier 1943. Elle devait y décéder courant mars 1943.
Les collectivités. La S.N.C.A.S.O.
GENDAMES DANS LA RÉSISTANCE
Lorsque Pierre Accoce publie son livre, il ne dispose que partiellement des archives de la gendarmerie. Et pourtant, depuis 2001, l’étude que l’auteur a entreprise sur la part prise par la gendarmerie dans la Résistance fait toujours référence et montre que la gendarmerie ni n’a été massivement complice des rafles et des déportations, ni n’a été un instrument zélé au service de l’Etat Vichyste, ni n’a pas été un relais docile de la politique de collaboration. Au contraire de nombreux soldats bleus ont rejoints très tôt la Résistance. Ils ont œuvré dans les réseaux existants, créé leurs propres antennes, combattu dans les maquis. Le quart de l’effectif a participé activement à la Résistance soit 12 000 gendarmes. Un pourcentage dont aucun autre corps de métier ne peut se prévaloir.
En guise de préambule
Sur les 12.000 gendarmes engagés dans la Résistance, 2.161 ont été arrêtés dont 1.141 ont été fusillés, ou morts en Allemagne, en prison ou en camp de concentration, ou tués au cours d’opérations de libération en France. Et 920 sont rentrés de déportation. La croix de la Libération a été décernée à 4, la médaille de la Résistance à 360, la Légion d’Honneur à 351, la médaille militaire à 1.060, la croix de guerre avec citations à 4852, la médaille des justes d’Israël à 7.
Quarante jours ont suffi pour battre l’armée française en 1940 et faire 1.580.000 prisonniers. Le diktat d’Hitler à Rethondes va ruiner la France et la déshonorer lorsque seront refoulés en Allemagne les ressortissants allemands qui s’étaient réfugiés chez nous dont les Juifs. Le 28 Juin 1940, la République bat en retraite et l’Etat français s’installe, le 2 Juillet, à Vichy. En 1939, la gendarmerie compte 54.000 hommes dont 1.514 officiers. A fin Juin 1940, sur les 12.000 gendarmes mêlés aux autres mobilisés, 377 ont été tués et 5.000 faits prisonniers. La garde républicaine à Paris est passée sous le joug allemand. La garde mobile s’est fondue dans la population. La départementale s’est efforcée d’escorter les réfugiés civils. Bref l’institution est disloquée.
Serignan, fil conducteur de la Résistance de la gendarmerie
L’armistice signé, Hitler nomme le Général Otto Von Stülpnagel à la tête de la commission chargée de son application. Elle siège à Wiesbaden et a pour mission de mettre au pas cette France honnie. La faire danser longtemps le ventre creux. La direction générale de la gendarmerie mandate pour la représenter près du Général Huntziger, le Capitaine Sérignan.
Ce Saint Cyrien, ancien du SR, parlant couramment l’allemand, remarqué par sa hiérarchie pour ses qualités hors normes3, est chargé d’obtenir la reconnaissance de la départementale en zone occupée dans son statut antérieur et que cette dernière en zone libre reste sous l’autorité de la Défense. Il est également mandaté pour obtenir le rapatriement des 5 000 gendarmes qui sont prisonniers et faire en sorte que la Wehrmacht évacue les casernements de gendarmerie qu’elle occupe. Arrivé à Wiesbaden, Sérignan, s’appuyant sur des raisons d’ordre public, rédige une synthèse qui prône le retour de la gendarmerie en zone occupée dans ses garnisons du temps de paix et demande pour cette mission 20.000 hommes. Ceci est, finalement, acceptée par Von Stülpnagel sous réserve que son statut soit discuté avec l’administration militaire allemande. Quant à la garde mobile républicaine en zone occupée elle est dissoute et devient, en zone libre, la Garde forte de 6.000 hommes.
Le 19 Juillet, Sérignan s’installe à Paris pour discuter du statut de la Départementale en zone occupée. Les allemands veulent la mettre sous les ordres de la police mais Sérignan obtient du nouveau commandant militaire que, dans un premier temps, quelques milliers de gendarmes se réinstallent dans leurs départements d’origine sauf dans le Nord et dans l’Est en régime d’annexion déguisée. Ensuite, il obtient que, faute de pouvoir maintenir la Garde Mobile en zone occupée, il intègre 7.000 gardes dans la Départementale. Tout ceci fait, en septembre 1940, que la maréchaussée en zone occupée compte 14.600 hommes dont 375 officiers. Pour le retour des 5.000 gendarmes prisonniers, Sérignan obtient d’Otto Von Stülpnagel le retour de 1.000 mis en congé de captivité puis d’un autre millier et, enfin, en mai 1941, de 2.385. Tous les libérés entrent dans la Départementale en zone occupée. Au final, avec la création d’une gendarmerie auxiliaire de 1.000 hommes chargés de la surveillance des ouvrages publics, et le recrutement de 1.200 autres gardes au titre « d’anciens combattants l’effectif VISÉ de 20.000 passe à 23 000. Pour éviter que la gendarmerie passe de la Défense à la police en zone occupée, Sérignan obtient qu’elle soit rattachée à la Délégation générale de l’Etat français à Paris ce qui, de fait, permet à la Direction générale de la gendarmerie près de la Défense d’avoir sous son autorité la Départementale de zone occupée.
Sérignan a mené toutes ces négociations à Paris où il s’est installé comme chef de La section Gendarmerie en Territoire Occupée (SGTO). Au fur et mesure que la Départementale va s’implanter en zone occupée, la SGTO va se décentraliser pour défendre les brigades près des Kommandanturs afin que la Départementale puisse remplir ses missions classiques locales et, du fait des circonstances, des missions occultes relevant de multiples engagements personnels émanant tant de la hiérarchie que de simples gendarmes. Il n’est pas possible de décrire ici tous ces engagements. Pour cela il faut lire le livre. Par contre j’ai retenu quelques engagements qui montreront aux lecteurs de ce DIGEST l’étendue et la diversité des actions de Résistance ainsi que leur foisonnement au sein de la gendarmerie. Sitôt les brigades en place en zone occupée et avec des fiches de démobilisation timbrées à l’avance, par des services militaires de la zone libre qui sont complices, Sérignan et le SGTO va démobiliser des milliers de mobilisés échappés de l’encerclement de leurs unités par les allemands qui les réclament comme prisonniers de guerre ! Les allemands s’aperçoivent de la manœuvre, s’en plaignent et s’en irritent. En particulier, le colonel Helmut Knochen. Sérignan est contraint à la prudence d’autant qu’à la tête de la Délégation générale de l’Etat français à Paris qui a autorité sur la SGTO, Léon Noêl est remplacé par Fernand de Brinon, germanophile grand teint, reçu plusieurs fois par Hitler dès 1933 et surnommé, dans l’administration préfectorale, l’Anguille eu égard à sa souplesse d’échine.
Le réseau Saint Jacques de maurice Duclos et Jean Verines
A Londres, le général de Gaulle décide, dès Juillet 1940, la création d’un Service de Renseignements en France qui soit en mesure d’identifier les forces et les installations à la disposition des allemands. Pour cela, trois réseaux, dépendant du BCRA, sont créés.
Le premier, depuis Paris, couvrira le Nord et l’Ouest jusqu’à la Touraine. Son responsable en sera Maurice Duclos. Il deviendra le réseau Saint Jacques. Le deuxième, couvrant toutes les côtes du Cotentin à l’Espagne sera confié à Gilbert Renault alias Rémy. Le réseau s’appellera La confrérie Notre Dame (CND). Le dernier, en zone libre, sera confié à Pierre Fourgaud alias Barres deviendra le réseau Luras. Duclos va être le premier agent opérationnel en France. Il installe Saint Jacques à Paris et sa première recrue est le chef d’escadron de gendarmerie Jean Vérines grand mutilé de 14/18 et commandant d’un bataillon de la Garde, place de la République. Duclos le charge d’organiser, au sein de la Garde et de la gendarmerie : un maillage capable d’expertiser l’état des forces terrestres, aériennes et maritimes du 3ème Reich du Nord de la France à la Normandie. Des lieux de passage à travers la ligne de démarcation.
Jean Vérines recrute dans son bataillon et au-delà. Ainsi du colonel Jean Baptiste Raby commandant de la 9ème région de gendarmerie de Tours, lui aussi vétéran de 14/18. Ainsi du colonel Emile Boillon, chef de la gendarmerie d’Amiens. En décembre, l’antenne Vérines couvre Paris, la Somme, l’Eure et la Touraine et l’antenne Nord, confiée par Duclos à Lucien Feltesse, un belge, couvre le Nord de la France et la Belgique. Ce sont, en tout, 300 agents qui arrivent à déterminer dans l’armement, l’état des voies routières, ferrées et fluviales, la description des aérodromes qui ont été crées avec desSTOCKS considérables d’essence et de munitions et qui sont protégés par une puissante DCA.
Toutes ces forces sont rassemblées pour la bataille d’Angleterre commencée le 12août 1940. L’assaut va se prolonger pendant quatre semaines puis, le 7 septembre, se déplacer, de la mer et des côtes, sur Londres. 375 bombardiers vont alors pilonner le Londres industriel et populaire, les docks et la centrale électrique de Westham. Le soir même, les bombardiers repartent, armés de bombes incendiaires au phosphore. Et ce, chaque soir jusqu’à la fin septembre 1940. Puis, chaque nuit en Octobre. Au dire d’experts, ce fut Guernica puissance 300. Mais, les britannique tiennent bons. La DCA et la RAF résistent. La Luftwaffe perd 2 375 avions, la RAF, 945. Parmi les civils anglais, on compte 14.621 morts et 20.252 blessés. Le bilan est lourd mais le premier round est gagné par les anglais et Hitler reporte le débarquement. Saint Jacques a d’ailleurs acquis la certitude que la Wehrmacht n’a pas le matériel adapté à un débarquement. Par contre la Kriegsmarine est sérieusement outillée pour une guerre océanique et Hitler décide de continuer à terroriser les anglais par la Luftwaffe et d’affamer avec les U.Boots. Saint Jacques cartographie des lieux de parachutages/atterrissages, organise le passage de la ligne de démarcation pour le courrier, les agents et les aviateurs alliés rescapés. Duclos retourne à Londres, obtient des moyens radios et revient en France avec un radio, Jean Mulemann, qui, retourné par l’Abwehr, va provoquer des désastres en cascade dans le réseau Saint Jacques. En attendant Saint Jacques, poursuit sa recherche de renseignements et est en mesure de décrire pour la Navy, l’importante concentration de sous-marins au Havre.
En parallèle l’Abwehr progresse dans la connaissance de ce réseau et, le 20 juin 1941, la SIPO arrête le Capitaine de gendarmerie Albert Morel et le gendarme Amédée Devineau au moment où ils franchissent la ligne de démarcation. Ils ont sur eux un abondant courrier notamment les plans de la base sous marine de Saint Nazaire. La SIPO attendait les deux agents. Ils avaient donc été donnés. Par Mulemann ? Sans doute.
La SIPO, dans la foulée, intervient à Paris, rate Duclos, mais la torture sans doute aidant, va arrêter le Colonel Raby, le Lieutenant Ernest Laurent et plusieurs de leurs hommes à la 9ème légion de gendarmerie (Tours), le Colonel Boillin, l’Adjudant chef Legrand et plusieurs de leurs hommes (Amiens), le Capitaine Le Flem et plusieurs de ses hommes (Pont l’Évêque). C’est ainsi que la SIPO arrive à Vérines qui est arrêté le 22 octobre 1941 avec plusieurs gardes. Le docteur Werner Best, qui supervise les liens de la SIPO avec la police française, remarque le nombre élevé de gendarmes arrêtés, mais aussi celui de ceux ayant échappé à la traque. Son chef Helmut Knochen fulmine, convoque Sérignan à l’hôtel Scribe où ce dernier subit injures et menaces VISANT l’ensemble des gendarmes Des ennemis du Reich.
Sérignan encaisse. Il connaît la plupart des officiers incarcérés, apprécie leur trempe, la valeur de leurs engagements, partagés le plus souvent par leurs hommes. Il sait que d’autres suivront et qu’il va falloir ajouter au rôle officiel qui est le sien, une fonction délicate près de l’occupant, défendre des compagnons que la détresse guettera.
Le réseau Vérité française du capitaine Descamps
Et ils seront nombreux. Tel le capitaine Henri Clotaire Descamps, basé à Soissons, à la tête de la section locale de gendarmerie antenne du mouvement du Musée de l’homme. Descamps aide le passage en zone libre de quelques prisonniers de guerre évadés, rencontre Daniel Douay et devient, avec lui et seize autres agents dont des gendarmes, un relais du Musée de l’Homme appelé Vérité Française. Descamps collecte avec méthode des renseignements sur les unités ennemies, diffuse la presse clandestine, crée des caches pour STOCKER les armes. Mais à Paris, Vilde est trompé par un nouveau venu, Albert Gaveau, homme à tout faire ayant le Capitaine Doering de la SIPO comme officier traitant. Gaveau se rend utile à tout le monde et ne tarde pas à connaître l’organigramme de l’organisation secrète de Vilde. La SIPO passe à l’action le 12 février 1941 et arrête Lewitsky, plusieurs avocats faisant partie du réseau du Musée de l’Homme dont Léon Maurice Nordmann et René Georges Etienne. Elle rate de peu le professeur Paul Rivet qui alerte Vilde.
Celui-ci est cependant arrêté le 26 mars. La tornade se répand en province avec l’aide de Jacques Desoubries qui, dans le sillage d’un agent de liaison, arrive à Soissons chez Douay/Descamps. Le 25 novembre 1941 la SIPO entre en action, arrête le Colonel de la Rochères qui avait adressé Desoubries à Douay/Descamps, encercle la caserne de gendarmerie de Soissons, roue de coups le Capitaine Descamps, l’arrête avec plusieurs de ses hommes et transfère les prisonniers à Fresnes. Descamps va subir douze interrogatoires musclés. Sans arrêt il est interrogé sur le Musée de l’Homme mais ne parle pas. Il est mis au secret. Un effrayant calvaire l’attend. Sérignan, pour la défense des gendarmes arrêtés, commence par noyer les instances judiciaires occupantes de procédures dilatoires VISANT à éviter leur comparution devant les tribunaux militaires du Reich. S’il échoue il essaye de minimiser les chefs d’inculpation et fait intervenir un groupe de spécialistes qu’il a constitué. Tous, comme lui, connaissent parfaitement la langue allemande tel Maître Heanning, juriste rigoureux. Lorsque des peines sont prononcées, Sérignan et ses avocats établissent des recours en grâce. Ainsi Sérignan et son service se porteront au secours de plus de 500 gendarmes.
Les gendarme Garin, descamps et Charlot, victimes de la barbarie
Le premier gendarme condamné à mort fut Maxime Garin de la 2ème légion de Picardie. Membre du réseau « Saint Jacques », il est passé par les armes fin décembre 1941 malgré une intervention de Sérignan près d’Otto Von Stülpnagel encore en fonction. Vains sont aussi les efforts de Sérignan pour le capitaine Descamps. Ce dernier, après avoir été très sévèrement torturé, reste au secret à Fresnes pendant 5 mois. Son procès commence le 15 mai 1942. Il sera long. Défendu par Heanning, Descamps est, néanmoins, condamné à mort. Sérignan dépose, alors, un recours en grâce et intercède directement auprès du nouveau chef des troupes d’occupation, le général Karl Heinrich Von Stülpnagel. Sérignan croit avoir gagné lorsque, en septembre 1942, on lui annonce que la peine de Descamps est commuée en 20 ans de forteresse en Allemagne. Mais c’est sans compter sur la duplicité de Von Stülpnagel qui, dès le 22 août 1942 a ratifié l’exécution par décapitation à la hachedu condamné. Descamps, le 14 septembre 1942, part en Allemagne. Il passe de prison en prison jusqu’à celle de Brandebourg (près de Postdam) où, le 23 septembre 1942, à 5h21 du matin, il est exécuté. Le 14 août 1942, c’est au tour d’un autre gendarme, Edouard Charlot d’être condamné à mort.
EDMOND MICHELET
Edmond Michelet, décédé en 1970 fut l’un des premier Résistants de France et la ville de Brive-la-Gaillarde, ou il habitait avec sa femme et ses sept enfants, fut certainement celle qui bascula à peu près tout entière dans la Résistance à l’envahisseur. L’un des fils d’Edmond Michelet raconte, ce que fut l’œuvre clandestine de son père et comment, après une action vigoureuse qui se prolongea pendant plus de deux années, il fut arrêté par la Gestapo.
Edmond Michelet décédé au mois d’octobre 1970. Dans sa résidence de Marillac, près de Brive, des suites d’une congestion cérébrale. Il occupait, à l’époque le poste de ministre des Affaires culturelles. Il y avait succédé à André Malraux. Le portrait a été pris peu de temps avant sa mort. Edmond Michelet a survécu à Dachau.
Sept heures moins le quart du matin. En ce mois de février, la nuit est encore complète. La ville de Brive dort. Dans les rues désertes, obscures, silencieuses, exceptionnelles sont les voitures; les réquisitions, la pénurie de carburant et de pneus, ont vidé pour un temps les artères de la ville. Le quartier Champanatier, déjà très calme avant-guerre est plus que jamais engourdi dans le silence.
Comme tous les matins, Mme Hyllaire s’est levée tôt. Bientôt, elle préparera le petit déjeuner de son fils qui dort avec ses secrets; elle le devine plus qu’elle le sait. Soudain elle tressaille. Quelle est cette voiture qui passe dans la rue? Elle tend l’oreille. Une voiture? Non, plusieurs qui bourdonnent, moteur au ralenti. Alors elle comprend, elle sait que dehors les autres préparent une rafle. Pour qui sont-ils là? Pour qui cernent-ils le quartier? Pour son fils qui dort dans la pièce à côté? Pour Edmond Michelet qui habite à deux pas de là? Pour les deux à la fois sans doute! Mme Hyllaire sait bien qu’un lien unit les deux hommes. Son fils n’est pas très bavard mais elle a compris que certaines des occupations relèvent du terrorisme, comme disent les Vichyssois. Une voiture passe lentement devant la maison. Mme Hyllaire éteint la lumière, se précipite jusqu’à la fenêtre qu’elle entrouvre. La Citroën prend la direction de la rue Champanatier, la rue des Michelet. Oui, c’est bien la rafle. Alors elle bondit jusqu’à la chambre de son fils.
Gaston! Réveille-toi. Ils sont chez Michelet!
Brive la Gaillarde, patrie d’Edmond Michelet, a ses petites rues, ses placettes pratiquement désertes mais qui s’animent aux soirs d’été, avec ses antiques voitures à chevaux.
Son fils comprend aussitôt, la clandestinité a affûté ses réflexes. Il s’habille à la hâte, embrasse sa mère : Tu leur diras que tu ne ma pas vu depuis longtemps et que tu ne sais pas ou je suis! Déjà il est dans le garage, il charge son vélo sur ses épaules et sort sans bruit dans le jardin. Il ne peut fuir que par-là puisque les autres surveillent toutes les rues du quartier. Le jardinet des Hyllaire communique avec ceux des voisins. Le fugitif saute les clôtures et disparaît dans la nuit. Quand la Gestapo arrivera chez lui, un peu plus tard, Gaston Hyllaire, dit Léonie pédale dans la nuit. Il pense qu’Edmond Michelet est pris, que le mouvement Combat de la Région 5 n’a plus de chef, mais que lui, Léonie adjoint de Michelet Duval, va prendre la suite pour que continue l’aventure commencée voici bientôt trois ans.
Au Congrès eucharistique de Munich, un pèlerinage expiratoire se déroule à l’ancien camp de concentration de Dachau. La chapelle édifiée au centre du camp est dédiée àl’Agonie du Christ. Mgr Neuhausen, ancien prisonnier de Dachau, la bénit. M. Edmond Michelet, alors garde des Sceaux assiste à la cérémonie.
BRIVE, UNE HALTE SUR LES ROUTES DE L’ÉXODE
17 juin 1940, C’est le cœur serré que je vous dis aujourd’hui qu’il faut cesser le combat. Je me suis adressé cette nuit à l’adversaire pour lui demander s’il est prêt à chercher avec moi, entre soldats, après la lutte et dans l’honneur, les moyens de mettre un terme aux hostilités. Que tous les Français se groupent autour du gouvernement que je préside pendant ces dures épreuves et fassent taire leur angoisse pour n’obéir qu’à leur foi dans le destin de la Patrie.
Edmond Michelet éteignit le poste de radio et étouffa ainsi la voix un peu chevrotante du vieux maréchal. Ainsi donc il fallait cesser le combat! Et non content de demander à tous de déposer les armes, le chef du Gouvernement osait parler d’honneur! Edmond Michelet sentit soudain tout le poids de la fatigue accumulée depuis des mois, depuis qu’il avait accepté de diriger le Secours National, organisation qui s’occupait d’héberger et de nourrir des réfugiés et des convois militaires.
Père de sept enfants, donc définitivement éloigné du service armé. Edmond Michelet, pourtant déjà très pris par sa profession d’agent commercial et ses multiples activités sociales et culturelles, n’avait pas hésité à assumer la responsabilité du Secours National de Brive; elle lui permettait de servir pacifiquement le pays et de ne pas rester passif au milieu de la tempête. Il n’était pas étonné par l’annonce de la défaite. Le passage des milliers de fuyards dont il avait assuré le gîte, lui avait ouvert les yeux et fait comprendre l’ampleur de la catastrophe. Avant eux, et au fur et à mesure de l’avance ennemie, il avait discuté avec des Alsaciens, des Lorrains, des Belges, et des Luxembourgeois. Mais désormais, ce ne serait plus des hommes, des femmes et des enfants apeurés, transis et affamés qu’il faudrait recevoir, ce serait des vainqueurs bien nourris, sûrs d’eux et de leur force, pleins de morgue, qui imposeraient au pays vaincu les principes du système nazi. Edmond Michelet n’ignorait rien du sort qui attendait la France. Il avait déjà hébergé et fait fuir des catholiques allemands et autrichiens et ceux-ci lui avaient brossé en connaisseurs le sombre tableau de l’hitlérisme. Edmond Michelet, catholique pratiquant, voyait entre autres, dans le nazisme l’ennemi redoutable de la liberté, donc du christianisme. Si des catholiques s’étaient expatriés, avant même que n’éclatât la guerre, c’est bien la preuve que, quoi qu’aient pu dire un Daladier ou un Chamberlain, l’entente avec Hitler était impossible pour ceux qui croyaient à la dignité humaine. Désormais, il allait falloir courber la tête et se plier aux exigences d’un dictateur.
LA PREMIÈRE FUEILLE CLANDESTINE DE FRANCE
Aussi pas un seul instant, il n’envisagea d’obéir à la demande que le maréchal Pétain vienne d’adresser à la France en ce 17 juin 1940. Ne pas obéir est une chose, désobéir en est une autre. On peut ne pas obéir en faisant la sourde oreille et en restant inerte, mais pour désobéir il fau aller à l’encontre de l’ordre reçu. Le maréchal demandait de déposer les armes, Edmond Michelet décida non seulement de n’en rien faire mais encore de se servir, et plus une jamais, de toutes ses armes, morales et spirituelles, s’entend, il lui parut impensable qu’on pût s’avouer vaincu avant d’avoir usé toutes ses forces et il était impossible que le pays tout entier fût affaibli au point de ne pouvoir résister davantage. Il en voulait come preuve sa propre réaction. Certes, il était plein de tristesse et d’amertume, certes il se sentait abattu, mai Grand Dieu! Pas encore suffisamment pour ouvrir sa porte à l’ennemi. Et si lui se sentait ainsi poussé à relever la tête et à refuser la défaite, il ne faisait aucun doute que, dans le pays, d’autres hommes partageaient son état d’esprit. La France millénaire ne pouvait du jour au lendemain, cesser d’être la France pour satisfaire aux ambitions d’un Autrichien mégalomane. Dans sa mémoire chantèrent soudain les paroles de Péguy, ce Péguy qu’il admirait tant et dont il connaissait, par cœur, tant de poèmes et c’est à son œuvre qu’il emprunta des citations pour composer un tract propre à faire naître l’esprit de résistance chez les Brivistes.
Au pèlerinage des Prisonniers et Déportés. À Lourdes. M. Edmond Michelet, alors ministre des Armées, assiste à la messe des dix-sept autels, présidée par Mgr Puquet, ancien camarade de déportation.
Mais pour mener à bien ses projets, il avait besoin de complices. Oui il s’agirait bien de complices puisqu’ils accompliraient un acte rendu délicieux par la seule déclaration du maréchal Pétain.
Depuis plusieurs années, Edmond Michelet dirigeait un groupe d’équipes sociales ou se pressaient surtout des jeunes ouvriers avides d’acquérir, ou de parfaire, une formation intellectuelle ou professionnelle. Il connaissait bien des sentiments de certains de ses équipiers et savait trouver en eux les hommes qui le seconderaient. Il se tourna aussi vers un de ses amis qui l’aidait dans l’animation des équipes, Antoine Mérignac, alors professeur au lycée de Brive, qui fut un des premiers à répondre à son appel. Vinrent aussi de jeunes hommes comme Vidal, Bourdelle, Soulingeas, Ils travaillaient presque tous à la S.N.C.F. ou ils menèrent, plus tard, un combat plus rude et plus dangereux que ce premier acte clandestin de résistance du 17 juin 1940. Ils se rassemblèrent au numéro 4 de la rue Champanatier, domicile d’Edmond Michelet, Celui-ci leur expliqua ce qu’il compta faire et tous furent unanimes pour lui venir en aide. Alors se posa le problème de l’impression du tract. Il était impossible de se rendre chez le premier imprimeur venu car déjà, il fallait être prudent! Ils décidèrent alors de s’adresser à M. Frédéric Malaure qui était digne d’être mis dans la confidence. M. Malaure n’étai pas imprimeur, mais vendait des machines à écrire et à polycopier et devait donc savoir s’en servir. Il apporta son concours sans hésiter, ce fut donc lui qui édita la première feuille clandestine de France.
DES CACHETS ET DES TAMPONS PLEIN LES POCHES
Edmond Michelet et sa poignée d’amis attendirent la nuit pour glisser dans les boîtes aux lettres, et partout ou ils le jugèrent bon, le texte de Péguy. Déjà, le général de Gaulle n’était plus le seul à vouloir poursuivre la lutte. Ce premier acte de Résistance n’eut pas un grand retentissement, mais il démontra aux Brivistes qui prirent connaissance du tract que certains Français refusaient la défaite, avant même l’appel du 18 juin, un petit noyau d’hommes, qui voulaient résister par tous les moyens, était formé. On est amené à penser, alors, comme le colonel Rémy, qu’il n’y a pas de coïncidence, que tout est lié et qu’un acte découle d’un autre, ce qui expliquerait que Brive, première ville résistante de France, fut aussi la première à se libérer par ses propres moyens, le 15 août 1944.
Le premier tract une fois diffusé, Edmond Michelet et ses comparses (moins d’une dizaine) décidèrent de ne pas s’arrêter en si bonne voie. Ils comprirent cependant que, faute de moyens et pour un temps, ils devraient se contenter de réitérer l’opération tract ce qu’ils firent en juillet et d’inscrire quelques slogans vengeurs sur les murs de la ville ou sur les wagons. C’était peu et quoique dangereux, presque puéril mais suffisant pour entretenir la flamme et attirer aussi les sympathisants. Le petit groupe s’étoffa peu à peu et se baptisa : Liberté. L’année 1940 s’achevait. Edmond Michelet décida très tôt de compartimenter au maximum son équipe. Il voulait éviter qu’un bavardage imprudent ou une confidence de l’un des membres ne déclenchât la réaction en chaîne qui anéantirait toute l’organisation car déjà Vichy veillait. Très prudent pour les autres, il assuma en revanche tous les risques. Pas un instant il ne cessa d’héberger les Juifs ou les Allemands qui lui demandèrent asile. Ainsi dut-il un jour prendre en charge seize intellectuels allemands que traquaient les nazis. Ces hommes et ces femmes avaient besoin de faux papiers; dépourvus, ils étaient à la merci du premier contrôle d’identité. Il décida de pallier cet état de chose et se rendit à la Préfecture. Une fois dans la place, il parvint à voler les cachets dont il avait besoin pour établir les fausses cartes d’identité et les faux passeports. Il revint de Tulle les poches pleines de tampons et put, grâce à ce larcin, donner une identité à ceux qui en avaient besoin.
M. Edmond Michelet recevant, en février 1968, il est ministre d’Etat, le général Abdel Rahman Aref, chef de l’Etat irakien, qui vient d’arriver à Nice en voyage officiel.
DES IMPRUDENCES CALCULÉES
La logique voudrait qu’un homme qui choisit de travaillé dans l’illégalité fasse son maximum pour que nul ne puisse soupçonner son rôle clandestin. Non content d’organiser des actions subversives, de colporter les nouvelles de la radio anglaise, de se plaindre de ne pouvoir rejoindre le général de Gaulle, il s’offrit le luxe de mener au grand jour sa petite campagne patriotique. Ainsi par exemple, décida-t’il d’intervenir lorsqu’il constata, au début de juillet 1940, que le buste de Marianne avait disparu dans de nombreuses mairies de la Corrèze. Partout ou cela se révéla nécessaire, il exigea la remise en place immédiate du symbole de la République trop vite enterrée. De telles démarches ne passèrent pas inaperçues, aussi, très tôt, fut-il considéré comme un farouche opposant au régime de Vichy.
Lorsqu’il fut arrêté en février 1943, il abonda dans le sens de l’accusation et reconnut, bien volontiers, être l’auteur de toutes ces peccadilles qui, expliqua-t-il, donnaient bien la preuve de son innocence en matière de vraie Résistance. En effet, dit-il aux enquêteurs, si comme vous l’affirmez, j’étais responsable d’un mouvement clandestin, me croyez-vous assez stupide pour me faire remarquer par toutes ces petites actions sans conséquences? Non, certainement pas! Si j’étais celui que vous cherchez, je me serais tenu coi, c’est élémentaire! Cette argumentation n’était pas sans finesse; il était en effet peu normal qu’un terroriste chef de mouvement ait pris le risque d’attirer aussi bêtement l’attention sur lui comme le faisait le suspect Michelet depuis juin 1940. Car en sus de ses récriminations aux maires, om pouvait aussi mettre à son actif plusieurs lettres de protestation qu’il avait envoyées aux journaux et dans lesquelles il n’avait pas mâché ses mots, Nul n’ignorait non plus qu’il avait témoigné en faveur d’un jeune communiste poursuivi et traduit devant le tribunal de Périgueux. De plus, de nombreux Brivistes pro-Allemands pouvaient rapporter les propos virulents qu’il ne s’était pas privé de tenir en public. La Gestapo n’ignorait rien de tout cela et peut-être pensa-t-elle qu’un individu aussi inconscient était incapable d’assumer les responsabilités de chef du mouvement Combat de la Région 5. Il n’est donc pas impensable de croire que sa folle témérité et ses écarts de langage lui évitèrent le poteau d’exécution.
Coupures de journaux Français ainsi que des tracts de la Résistance
Très imprudent par certains côtés, il usa pourtant d’une grande circonspection pour établir le contact avec ceux de chez qui il espérait trouver des sentiments analogues aux siens. En effet, le groupe Liberté ne lui suffisait plus, il rêvait d’élargir son champ d’action. Mais pour cela, il fallait sortir du cadre de Brive et même du département. Il comprit que le ciel lui venait en aide lorsqu’une lettre, anonyme, mais dont il reconnut l’auteur à son écriture, lui rappela les idées débattues jadis par ceux qui animaient la Démocratie chrétienne. La missive était de François de Menthon et c’est par lui qu’il put entrer en relation avec ceux qui, partout en France, luttaient eux aussi.
L’INITIATION AU TERRORISME
Il avait lui-même milité dans la Démocratie chrétienne et connaissait bon nombre de ces hommes qui, comme lui, résistaient. Il était l’ami du père Maydieu, d’Étienne Borne, de Pierre-Henry Teitgen et de quelques autres, dont Georges Bidault. Alors se nouèrent les contacts qui, en 1941, permirent l’entrevue Frenay-Michelet. Henry Frenay qui créait le mouvement Combat à l’échelon national, voyant le groupe Liberté bien structuré et déjà efficace, décida de confier à Edmond Michelet la responsabilité de la Région 5 qui couvrait les départements de la Corrèze, du Lot, de la Dordogne et de la Haute-Vienne. A compter de ce jour, Edmond Michelet se débaptisa au profit du pseudonyme Duval. Il nomma aussitôt ses adjoints, MM.Baillely, Mérignac, Biberson, Faure et veilla à que ceux-ci bien que se connaissantm ignorent les tâches confiées à leurs complices. Le groupe Liberté disparut et céda la place au mouvement Combat. Dès lors, les activités prirent une autre ampleur. D’une part se développa toute la presse clandestine grâce à la diffusion des journaux Combat et Liberté et à l’édition du manuscrit de Jacques Maritain : A travers le désastre. D’autre part se créèrent les petits groupes francs dont le premier but fut l’intimidation des Français trop complaisants à l’égard de Vichy. Edmond Michelet confia à son cousin le bijoutier André Delon, la responsabilité de ses groupes; il lui demanda, dans un premier temps, de borner ses actions à des seuls avertissements propres à inquiéter ceux que l’on nommait déjà des collaborateurs et à prouver à la population que, en dépit des affirmations de Vichy, une organisation clandestine agissante existait.
Pendant toute l’année 1941, le mouvement Combat développa son implantation dans la zone sud encore inoccupée. Des responsables furent nommés pour donner le maximum d’efficacité à l’action clandestine orientée vers plusieurs formes d’action. Certaines équipes se spécialisèrent dans l’action directe (bombes et premiers sabotages), d’autres dans la propagande, d’autres enfin dans l’impression de tracts et journaux.
Ce fut l’époque ou Edmond Michelet hébergea de curieux clients, personnages dont le courtier assermenté n’avait que faire, mais que Duval recevait à bras ouverts. Ainsi Pierre Brossolette, Jacques Renouvin, Berthie Albrecht (La secrétaire d’Henry Frenay), Jean-Guy Bernard, l’abbé Charles Lair, bien d’autres encore qui, presque tous, n’eurent pas la joie de célébrer le 8 mai 1945. Pierre Brossolette se tua en cherchant à s’évader, Renouvin, Jean-Guy Bernard, l’abbé Lair moururent en déportation ou furent fusillé Berthie Albrecht fut décapité à la hache. Tous ceux-là passèrent au 4 de la rue Champanatier. Avec Renouvin commença l’ère du plasticage du vrai. Responsable national des groupes francs, il multiplia les expéditions punitives contre les collaborateurs; il donna le nom de kermesse à ses séances nocturnes. Mais qu’il s’agisse de ces kermesses un peu spéciales, du recrutement de sympathisants, de diffusion de journaux, tout dut être organisé pour préserver le secret dont dépendaient le sort du mouvement et la vie de ses animateurs. La stricte prudence observée dans les contacts fut efficace elle réduisit plus tard la portée des rafles de la Gestapo et sauva même la vie d’Edmond Michelet. C’est ainsi que Schneider, qui vendit le mouvement Combat, fut incapable de le reconnaître ni de donner son vrai nom.
UN COLONEL ALLEMAND D’ORIGINE CORRÉZIENNE
Là encore, ce fut pour répondre à l’appel de Londres qu’Edmond Michelet et ses amis organisèrent cette mémorable cérémonie. Ils commencèrent par faire imprimer des milliers de tracts invitant la population à se rendre, le 11 novembre à 18 heures, devant le monument aux morts pour assister au dépôt d’une gerbe. Les tracts étaient distribués lorsque Londres, apprenant l’entrée des Allemands en zone Sud, décida d’annuler toute manifestation. Trop tard, les Brivistes étaient prêts. Edmond Michelet et ses amis comprirent qu’ils ne pouvaient plus reculer et cela d’autant moins que les autorités venaient d’interdire toute forme de rassemblement. Ils décidèrent donc d’agir comme si de rien n’était, comme si nul cordon de police n’était là pour fermer l’accès au monument aux morts, comme si les Allemands n’étaient pas aux portes de la ville. Les citoyens firent de même et vers 17 heures, les rues et les boulevards conduisant au lieu de rendez-vous étaient noirs de monde. Déjà des cris fusaient en direction des forces de l’ordre, déjà ça et là, on fredonnait la Marseillaise, déjà on envoyait Laval au poteau. La foule grossit et devint de plus en plus agressive envers les gardes mobiles qui protégeaient toujours les abords du monument. Vers 18 heures éclatèrent quelques brèves bagarres et c’est à ce moment que la colonne Allemande déboucha au sein même de la manifestation. Unique sans doute fut la ville ou les Allemands furent reçus aux cris de Vive de Gaulle, Vive la Résistance, Vive la France! Et ou ils durent en guise de chant d’accueil, entendre la formidable Marseillaise que lancèrent des milliers de gorges. Il y eut aussi des heurts, des motocyclistes se firent gifler, d’autres furent jetés par terre. Malgré cela, les troupes Allemandes ne réagirent pas; elles laissèrent aux policiers le soin de retenir, non sans peine, la colère des Brivistes qui, furieux, organisèrent un défilé sur les boulevards. Le calme ne revint que plus tard dans la soirée et, comme il avait été prévu, et malgré les barrages de police, une gerbe fut déposée au pied du monument aux morts.
Pour saisir l’attitude passive de l’envahisseur, il faut savoir que le colonel qui commandait les troupes était un certain Von La chaud, lointain descendant de huguenots émigrés, natifs de la Corrèze. Peut-être ne voulut-il pas mater une population dont il se sentait proche, mais il se rattrapa ensuite. D’ailleurs, et dès le lendemain, plusieurs manifestants furent arrêtés. La ville entière fut désormais suspecte aux yeux de l’envahisseur qui confia à sa Gestapo la charge de la débarrasser de ses brebis gaullistes, donc galleuses.
En décembre 1958, M. Edmond Michelet commente la victoire des L’U.N.R. devant les journalistes.
LA GESTAPO PERD LA PREMIÈRE MANCHE
L’envahisseur de la zone Sud compliqua beaucoup le travail clandestin. La Gestapo, à peine installée, se montra plus tenace et plus efficace que la police de Vichy. Néanmoins, Edmond Michelet persista à suivre la ligne qu’il s’était tracée, mais il sut bientôt que de lourds soupçons pesaient sur lui. Certes, il faisait maintenant tout pour donner le change, mais il en était au point ou bien rares sont les ruses qui peuvent encore tromper l’enquêteur. Vint le temps ou l se sentit épié, suivi et ou il dut prendre les plus invraisemblables précautions afin d’honorer ses rendez-vous. Ainsi un jour où il était dans l’obligation de contacter directement son cousin André Delon il dut, pour justifier sa visite dans la bijouterie, acheter la première bricole qui lui tomba sous la main (un affreux confiturier en pseudo-porcelaine). Cela lui permit de ressortir du magasin en portant, ostensiblement, le petit paquet alibi. Mais trop d’actions terroristes excitaient la hargne des vainqueurs pour que ceux-ci relâchent leur attention et soient dupes d’un tel procédé. En effet, André Delon et ses groupes francs entretenaient au mieux un climat d’insécurité : poteaux indicateurs inversés qui expédiaient les véhicules allemands dans de fantaisistes directions, paquets de journaux clandestins déposés dans la boîte aux lettres du commissariat de police; enfin, en pleine ville de Brive, c’était le jeune Champeval qui semait la perturbation en sabotant les câbles téléphoniques. Placée dans un tel climat, la Gestapo se devait de frapper un grand coup. Il fut désastreux pour le mouvement Combat qui, le 29 janvier 1943, vit arrêter vingt de ses membres et non des moindres puisque furent pris, entre autres : Renouvin, André Delon (qui ne Revin pas de la déportation), André Faure (alors chef régional de la propagande) Roubinet Madelrieux et Jarasse (responsables de Tulle ret d’Ussel).
Le 14 juillet 1958 : le général de Gaulle, ayant à ses côtés M. Edmond Michelet, ministre des Anciens combattants. S’adresse aux vétérans et aux jeunes d’Algérie rassemblé à Vincennes. C’est encore au temps de l’Algérie Française.
Dans l’étendue du désastre, Henry Frenay demanda alors à Duval de fuir au plus vite et d’aller se cacher à Montpellier ou, une fois oublié, il prendrait la place de P.H. Teitgen obligé, lui aussi de changer de secteur. Mais Edmond Michelet ne pouvait quitter Brive en laissant derrière lui sa femme et ses sept enfants, il ne ses serait jamais pardonné cet abandon de poste. Il refusa de partir et entreprit de réorganiser le mouvement. Il savait devoir agir rapidement, il se considérait en sursis et s’étonnait d’être encore libre. L’avertissement qu’il reçut le 2 février le renforça dans la conviction que l’heure des menottes était proche.
Ce soir-là, Edmond Michelet présidait une conférence à laquelle assistaient de nombreux agents commerciaux de la zone Sud. La séance était déjà avancée lorsqu’elle fut interrompue par l’arrivée de la police allemande. L’officier fit savoir qu’il venait pour procéder à l’arrestation d »Edmond Michelet. Celui-ci se piquant d’audace, prit la chose de très haut; loin de se laisser emmener, il attaqua :
Messieurs, dit-il, le droit international, les lois françaises et allemandes s’opposent à mon arrestation. M. le Maire et ses conseillers, qui sont là, vous diront que cette arrestation est illégale puisqu’elle se déroule dans un établissement public!
L’officier, interloqué, bafouilla quelque peu, puis se reprit, il ne comprit pas pourquoi la salle croula de rire lorsqu’il eut déclaré :
Ah? On ne m’avait pas dit que c’était ici la maison publique.
Mais les farces courtelinesques n’étaient pas de mise en 1943, la Gestapo prisait peu l’humour et Edmond Michelet fut conduit jusqu’à la Kommandantur. Il prit soin de se faire accompagner par le maire et nombreux furent aussi les amis qui lui emboîtèrent le pas. Les autorités allemandes comprirent sans doute qu’une arrestation aussi peu discrète risquait de réveiller la colère de ces Brivistes, dont il fallait se méfier, le 11 novembre n’était pas loin.Et Edmond Michelet fut relâché, il était trop connu, trop populaire, son arrestation devait être moins spectaculaire, elle le fut.
JUDEN ? NON CE SONT MES ENFANTS
L’heure du laitier. Ainsi Edmond Michelet dans son livre, Rue de la Liberté, baptisa-t-il l’heure de son arrestation. Il était environ 7 heures et il achevait sa toilette. Il avait déjà enfilé son pantalon et, une veste de pyjama, une serviette autour du coup, il se rasait. Comme tous les jours il serait prêt pour la messe de 7 heures et demie à Saint-Cernin. Sa femme préparait les petits déjeuners. Dans la chambre, ses trois derniers fils chahutaient dans le grand lit; ils s’y nichaient tous les matins dès que les parents l’avaient déserté. Edmond Michelet n’entendit pas la voiture de la Gestapo car, profitant de la rue en pente, elle glissa et s’immobilisa sans bruit devant la maison. Il n’entendit pas non plus la courte scène qui se déroula au rez-de-chaussée quand les policiers allemands se heurtèrent à Mme Michelet et à la femme de ménage. Elles tentèrent de retenir les Policiers, mais elles furent bousculées. L’un des hommes voyant que Mme Micheket se préparait à téléphoner (elle voulait alerter la sous-préfecture), lui arracha l’appareil des mains et débrancha les fils. Puis ils exigèrent qu’elle les conduisit jusqu’à son mari. Celui-ci finissait de se raser lorsque les quatre individus, en cirés noirs et chapeaux mous se précipitèrent dans la chambre.
Vous êtes Edmond Michelet? On vous arrête, annonça l’un d’eux.
Puis il aperçût le grand lit ou, apeurés, se pressaient les enfants. On ne prête qu’aux riches, aussi l’homme de la Gestapo pensa-t-il faire coup double et ouvrant le lit, il interrogea :
Jugen?
Non, ce sont mes enfants, dit Edmond Michelet.
Bon, dépêchez-vous on vous emmène.
Il lui laissa à peine le temps de finir de s’habiller, puis ils l’encadrèrent et le poussèrent dehors ou il faisait encore nuit et froid. Opération réussie car discrète. Michelet était pris. Maintenant il allait devoir fournir quelques explications.
La voiture démarra. Elle prit la direction de l’hôtel Terminus ou siégeaient alors ces messieurs de la Gestapo. C’était le 25 février 1943.
PERSONNAGES DE LA RÉSISTANCE
René Pierre
René Chabasse (1921 - 1944). Traqué par la Gestapo, René Chabasse est arrêté le 21 février 1944 à Angoulême et abattu par une sentinelle allemande lors de sa tentative d'évasion.
Pierre Chabasse (1925 - 1945). Nommé sergent, il est tué à la tête de ses hommes devant le point d'appui de Brie (Charente-Maritime), le 14 avril 1945.
André Chabanne (1914 - 1963). Il meurt le 12 février 1963.
Claude Bonier (1897 - 1944). Arrêté sur dénonciation à Bordeaux par la gestapo, le 9 février 1944, Claude BONNIER se donne la mort à l'aide d'une capsule de cyanure.
Jacques Nancy (1912 - 1987). Il décède le 10 juillet 1987, à Salon de Provence (Bouches du Rhône).
Bernard Lelay (1911-1975). Il meurt en 1975 à Bagnolet.
Jean-Pierre LevyFausse 1910-1996, carte d'identité remise à Jean-Pierre Lévy à Londres
Mort en martyr une semaine avant la reddition des troupes allemandes.
Claude Lerude 1920-1945. Mort d'épuisement en 1945
Elisabeth Torlet 1915-1944. Abattue d'une balle dans la tête
André Maillet, dit Polyte, de la Chaussée St Victor. Responsable A.J. Blois, réseau France Liberté. Arrêté en décembre 1942, déporté, mort à Mauthausen Gusen le 6 avril 1945
André Filloux, de Villefranche/Cher. Mort le 3 septembre 1942 à Auschwitz.
Robert Auger, de St Romain/Cher, transporteur à Blois Membre du Comité clandestin départemental F.N. F.T.P.F. avec Lucien Jardel Liaison blésoise avec Pierre Georges Colonel Fabien. Arrêté en avril 1944 avec Maurice Caillard et sa femme OdetteFusillé avec M. Caillard le 19 avril 1944 à la Chaussée St Victor Frère de Marc Auger, fusillé le 5 mai 1942 aux Grouets Un boulevard de Blois-Vienne porte leurs noms.
Julien Nadeau, de Contres les Membres de Libération Nord, chef du Bureau des Opérations Aériennes (B.O.A.). Arrêté à Chateauvieux la Raberie le 2 mai 1944 avec les Cabreux et les Bourbonnais. Déporté, mort le 6 mars 1945 à Neuengamme.
Auguste Michel, dit Fito, élève du lycée Augustin Thierry de Blois. Chef détachement F.T.P.F. Tué le 5 juillet 1944 à St Gervais la Forêt, où une stèle marque l'endroit de sa mort une rue de St Gervais la Forêt porte son nom.
Hubert Jarry, dit Priam, aspirant de l'armée française. Chef du détachement Capitaine F.T.P.F. Tué le 23 juillet 1944 à Chambon/Cisse Varennes avec Robert Tanvier (Bill). Par le nombre et la qualité de ses sabotages il doit être considéré comme l'un des Résistants les plus efficaces. Ancien élève du collège Augustin Thierry de Blois.
Yvonne Cholet, institutrice à Vendôme. Arrêtée pour propos antinazis et déportée. Morte le 23 février 1945 à Ravensbrück. Une école de Vendôme porte son nom.
Gontran Labregère. Premier fusillé charentais.
Jean-Jacques Rivière, compagnon de Gontran Labrégère déporté en février 1942.
Jacques Joly 1928-1944, 16 ans tués à Sainte- Catherine le 24 août 1944 dans les combats précédant à la Libération d'Angoulême.
Armand Colard. Fusillé à La Citadelle le 7 juin 1944.
Adrien Colard, (en haut), avec le Cdt du Refuge de Harre - St -Antoine, Antoine Bosak (Soviétique évadé)
Cette résistante s'appelle Lydie. Remarquez son bonnet de police de fabrication artisanale: le nom Byl est brodé
Marcel Tassin: officier de Byl. Il un cousin de Byl. Fusillé à La Citadelle de Liège le 24 mai 1944.
FORCES FRANÇAISES DE L’INTÉRIEUR (FFI)
Les Forces françaises de l'intérieur (FFI) est le nom générique donné en 1944 à l'ensemble des groupements militaires de la Résistance intérieure française qui s'étaient constitués dans la France occupée : l'Armée secrète (AS) (regroupant Combat, Libération-Sud, Franc-Tireur), l'Organisation de résistance de l'armée (ORA), les Francs-tireurs et partisans (FTP), etc. La dénomination commune de FFI n'était pas destinée seulement à unifier et à donner un cadre légal aux forces de la Résistance intérieure, mais aussi à les structurer de manière hiérarchique. Les FFI furent ainsi placées en mars 1944 sous le commandement du général Kœnig et l'autorité politique du GPRF du général de Gaulle.
Véhicule des FFI à la libération de Paris
Les FFI jouèrent un rôle non négligeable dans la préparation du débarquement allié en Normandie de juin 1944 et dans la libération de la France. Le commandant des forces alliées en Europe, le général Eisenhower estima l'aide apportée par les FFI à l'équivalent de quinze divisions régulières.
A l'issue de la libération de la France, les FFI s'intégrèrent ensuite dans l'armée française régulière, en particulier au sein de la première armée du général de Lattre, dans le cadre de ce qui a été appelé à l'époque l'amalgame des Résistances intérieure et extérieure.
Maquisards et troupes régulières se concertent après le Débarquement de Normandie
Les FFI sont le résultat d'un processus complexe d'unification des mouvements de Résistance intérieure. Ils fédèrent ainsi l'Armée secrète, issue des Mouvements unis de résistance (MUR) rassemblés en mars 1943 par Jean Moulin (à peu près 90 000 hommes)? Les Francs-Tireurs et Partisans Français (FTP ou FTPF) structurés par les communistes depuis mars 1942? L’Organisation de résistance de l'armée, méfiante vis-à-vis des FTP, qui recrute parmi les militaires de carrière? Les maquis enfin. La capacité de contrôle de ces quelque 250 000 hommes est variable. De Gaulle envoie des délégués militaires nationaux (Marchal, puis Mangin, Bourgès-Maunoury et Chaban-Delmas) qui désignent des délégués régionaux, le tout sous le commandement du général Kœnig, chef à Londres de l'état-major des FFI : ils doivent coordonner, au nom du Comité français de libération nationale, les actions des FFI pour le jour J. De son côté, le Conseil national de la Résistance (CNR) constitue lui-même sa propre structure de contrôle pour les FFI, avec le Comac (Comité d'action) qui nomme un état-major (Jussieu, puis Malleret alias Joinville). Les FFI, malgré ces multiples structures de commandement, d'ailleurs souvent plus théoriques que réelles, sont effectivement engagées sur de nombreux fronts à partir du débarquement en Normandie : d'une part, par les sabotages qui freinent de façon décisive les déplacements de la Wehrmacht (plan vert pour les voies ferrées, plan bleu pour le réseau électrique, plan tortue pour les routes)? D’autre part, par des actions militaires conjointes avec les forces alliées de libération, en Normandie et en Bretagne? Enfin, par des actions militaires où l'initiative leur revient, parfois dramatiques comme dans le maquis du Vercors, souvent victorieuses comme la Libération de Paris ou celle du centre de la France. Les FFI ont été ensuite incorporées pour la plupart dans la 1re armée du général de Lattre de Tassigny.
Maquis du Limousin
Le maquis du Limousin était l'un des plus grands et actifs maquis de France.
Historique
Cette région a été profondément marquée par les 99 pendus de Tulle le 9 juin 1944 et le massacre d'Oradour-sur-Glane le 10 juin 1944 suite au débarquement en Normandie et au passage de la division SS Das Reich en Corrèze et en Haute-Vienne. De même, ce maquis a été troublé par les antagonismes constants entre les maquis A.S. et F.T.P quant aux modes d'actions (notamment à Tulle et à Guéret), à la répartition des pouvoirs locaux à la Libération en août 1944 ainsi qu'à l'ampleur de l'épuration.
Dirigé pour les Mouvements unis de la Résistance par Gontran Royer, les responsables les plus connus du maquis Limousin furent Edmond Michelet, André Malraux, Georges Guingouin ou encore Roger Lescure, Albert Fossey-François, Louis Lemoigne, Roger Cerclier, René Vaujour, Marius Guedin et leurs camarades martyrs Jacques Renouvin, André Delon, Martial Brigouleix, Raymond Farro,Florentin Gourmelen, Pierre Souletie
Dirigé depuis la région de Brive-la-Gaillarde puis de Limoges, ce maquis se scindait en plusieurs secteurs principaux : maquis AS de Basse-Corrèze (Brive), Moyenne-Corrèze (Tulle) et Haute-Corrèze (Neuvic-Ussel) maquis FTP entre Corrèze et Dordogne maquis AS Creusois (Guéret) maquis FTP Limousin (Saint-Gilles-les-Forêts)
Il convient également de noter l'activité considérable déployée par les corps-francs en Basse-Corrèze et les agents de renseignements sur l'ensemble de la région, notamment par René Jugie-Gao ou André Girard pour le compte du réseau Alliance dont l'abbé Lair fut à Tulle l'une des plus belles et courageuses figures.
Faits d'armes principaux
Les Maquisards Limousins se sont opposés à l'occupant comme partout ailleurs en France. Toutefois certains faits d'armes, en particulier en 1944, ont marqués la population locale et nationale :
13 mars 1943 : destruction du Viaduc de Bussy-Varache
26 mars au 19 avril 1944 : Attaques contre la division de repression du général Walter Brehmer.
7 juin 1944 : Bataille de Tulle
7 juin 1944 : Première libération de Guéret reprise par les allemands le 9 aout.
7 juin 1944 : Embuscade du Chavanon
8 au 11 juin 1944 : Attaques contre la division SS Das Reich.
14 juin 1944 : Le barrage de Marèges est libéré.
18 au 24 juillet 1944 : Bataille du Mont Gargan.
7 juin au 24 aout 1944 : Attaques contre la colonne de repression du général Kurt Von Jesser.
12 au 17 août : Siège d'Egletons levé par l'arrivé de la colonne Jesser
17 août : Libération d'Ussel, occupée en fin de journée par la colonne Jesser.
25 août 1944 : Libération définitive de Guéret.
Henri Écochard né le 24 avril 1923 dans une vieille famille airvaudaise. Il a 16 ans en septembre 1939 à la déclaration de guerre et entre en première au Lycée Descartes à Tours.
Alors que ses amis airvaudais sont plutôt pacifistes et certains camarades du lycée gagnés aux idées antiparlementaires du colonel de la Rocque, il a quant à lui la fibre antifasciste. Il suit en effet avec intérêt les évènements internationaux et s’est indigné des Accords de Munich. Le 1er septembre, il hisse le drapeau tricolore à la façade de la maison tricolore.
Révolté par la défaite militaire, il espère jusqu’au dernier jour que l’armée française résiste sur la Loire, à l’instar des cadets de Saumur. Le 12 juin, à l’approche de l’armée allemande, le lycée ferme ses portes mais ses parents décident de rester à Tours pour obéir aux ordres.
Rentré à Airvault en vélo chez ses grands parents, il est bouleversé par l’annonce de l’armistice entendu à la radio. Il ne comprend pas qu’on puisse traiter avec Hitler, un bandit qui avait renié sa parole plus de dix fois. Le 21 juin, il entend Churchill souhaiter courage aux Français et leur annoncer que l’Angleterre ne se rendrait jamais. Apercevant un motard allemand dans les rues d’Airvault, il prend la résolution de rejoindre le seul pays à poursuivre la guerre. Refusant d’être un esclave, Il veut un fusil pour libérer son pays, prêt à vendre chèrement sa peau.
Il gagne La Rochelle en vélo et se fait embarquer par un thonier polonais qui le dépose à Cardiff après six jours de navigation. Ne parlant pas l’anglais, et jugé suspect par les autorités britanniques, il est emprisonné pendant huit jours avant d’être conduit à Londres parmi les soldats français du général Bethouart, réfugiés en Angleterre après avoir pris Narvik en Norvège. Il entend alors parler d’un général De Gaulle qui invite tous les volontaires à se joindre à lui.
Il a dix-sept ans et doit falsifier ses papiers pour être incorporé parmi les premières forces françaises libres qui ne comptent que 2900 hommes en juillet 1940. Il défile à Londres le 14 juillet et poursuit son instruction militaire en défendant l’Angleterre contre les parachutistes allemands. Habile en mécanique, il devient instructeur motocycliste
Le général de Gaulle passant en revue les troupes du général Leclerc en Afrique du Nord.
En tenue de pilote Henri Écochard devant son avion en Provence. Août 1944.
De janvier 1942 à mai 1943, il est brigadier dans un régiment d’automitrailleuses en Égypte, en Libye et en Tunisie. En juin 1943, il est nommé officier et apprend à piloter des avions d’observation. Il suit son régiment d’artillerie en Italie et participe au débarquement en Provence. Après un passage à Airvault pour saluer sa famille qu’il n’a pas revue depuis juin 1940, il libère le territoire français jusqu’au Rhin avant d’être démobilisé le 30 juin 1945.
Un membre des FFI à l'affût derrière une traction-avant en août 1944.
Les FFI et la libération de Paris
Loin du front, des affrontements nombreux ont lieu entre l’armée allemande et les Forces françaises de l’intérieur (FFI). La Résistance déclenche en effet une guérilla VISANT à empêcher l’acheminement de renforts vers l’ouest. Des maquis sont anéantis comme celui du Vercors. Certaines troupes allemandes commettent des massacres, notamment à Oradour-sur-Glane et Tulle, tandis que les résistants exécutent des collaborateurs.
En parallèle, le général de Gaulle fait reconnaître l’autorité du Gouvernement provisoire de la République française (GPRF) aux Alliés réticents, ainsi qu’aux résistants communistes. Les Américains laissent la 2e DB française du général Leclerc porter secours aux Parisiens, soulevés depuis le 19 août aux côtés des FFI. La libération de la capitale, le 25 août, permet au chef de la France libre d’asseoir sa légitimité populaire.
Les Forces françaises libres (FFL), commandées par les généraux Leclerc et Kœnig, livrèrent des batailles décisives contre les Allemands commandés par le général Rommel.
Un maquisard des Forces françaises de l’intérieur, Provence, 1944, Une ordonnance du Comité français de la Libération nationale (CFLN) crée officiellement, le 1er février 1944, les Forces françaises de l'intérieur (FFI), en fusionnant les groupes armés des différents mouvements de la Résistance.
L’objet en lui-même
Cette tenue a été reconstituée à partir d'une photographie d'époque. Elle est donc le fidèle reflet de la tenue portée par un maquisard des Forces françaises de l'intérieur (FFI) de Provence durant l'été 1944. Elle comporte des pantalons et un paletot colonial modèle 1941 provenant des STOCKS de l'ancienne armée d'armistice, une grenade à manche allemande modèle 1924 et un fusil allemand Mauser modèle 1898K. Cet aspect hétéroclite illustre à la fois la volonté de la résistance intérieure d'être considérée comme une véritable armée régulière mais aussi le manque de moyens dont elle dispose, notamment dans le domaine de l'armement.
L’objet nous raconte
Pour échapper au Service du Travail Obligatoire (STO) en Allemagne imposé par le gouvernement de Vichy à partir du 16 février 1943, des dizaines de milliers de jeunes Français quittent villes et villages pour se réfugier dans des zones difficiles d'accès (forêts et montagnes) où ils vivent en groupes dans des conditions précaires. Ils forment des maquis. Ce nom est repris d'une formation végétale touffue commune en Corse où elle offre un abri naturel aux fugitifs.
La Résistance les prend en charge avec l'objectif de transformer ces réfractaires en combattants. Des chefs de toutes appartenances, Armée secrète (gaullistes), Francs-tireurs et partisans (communistes), Organisation de Résistance de l'Armée (cadres de l'armée d'armistice dissoute) les regroupent, les organisent et leur apprennent le maniement des armes. L'unification de ces mouvements s'effectue progressivement dans le cadre du Comité national de la Résistance et donne naissance aux FFI. En mars 1944, le nombre des FFI est estimé à 300 000 Les troupes allemandes et les forces répressives du gouvernement de Vichy (miliciens et policiers des Groupes mobiles de réserve) les considèrent comme terroristes. Les maquis des Glières ou du Vercors sont impitoyablement LIQUIDÉS. En mai 1944, de Gaulle nomme-le général Koenig, le héros de Bir-Hakeim, commandant en chef des FFI. Ce commandement français de la Résistance est reconnu par les Alliés. Toutefois, ces derniers sont réticents à armer ces forces. Les Alliés et de Gaulle se méfient des objectifs politiques des communistes nombreux dans les états-majors FFI.
Ils considèrent les FFI comme une force auxiliaire qui doit s'insérer au sein du plan allié de débarquement et de libération du territoire.
Ils sous estiment cette force militaire potentielle qu'ils réservent aux opérations de renseignement et de sabotage.
Les FFI, au contraire, souhaitent une insurrection générale, étape initiale d'une libération soutenue par les alliés, mais ils surestiment leurs capacités face à une armée allemande qui reste bien équipée et entraînée. A l'annonce du Débarquement de Normandie, les FFI passent à l'offensive dans le cadre de plans d'action prédéfinis : plan vert : (destructions des voies ferrées), plan bleu : (sabotage du réseau électrique) et plan tortue : (harcèlement des renforts allemands). Souvent peu armés, ils subissent de lourdes pertes. Le 10 juin 1944, le général Koenig, chef des Forces Françaises de l'Intérieur (FFI), demande de freiner cette mobilisation. Après le débarquement de Provence, ces forces connaissent une rapide montée de leurs effectifs et prennent le contrôle de nombreuses villes. Une partie des FFI intègre ensuite l'armée régulière. Reconstitués en bataillons et régiments, ils renforcent des divisions existantes de la 1ère Armée, en forment de nouvelles au sein de celle-ci. Ils constituent aussi l'essentiel des forces chargées de réduire les poches de l'Atlantique.
Des jeunes maquisards français suivent un entraînement aux maniements d'armes britanniques par des instructeurs britanniques
Chronologie de la libération de paris
Beaucoup de Parisiens ont laissé des écrits. Adrien Dansette a fait paraître en 1946 une Histoire de la libération de Paris et de plus, le téléphone ayant fonctionné à peu près normalement pendant l'insurrection, il existe un enregistrement des communications passées à la Préfecture de police. Dans son Journal secret de la libération de Paris, Yves Cazaux, haut fonctionnaire de l'Hôtel de Ville, nous donne même des précisions climatiques.
Jeudi 17 août La Radio nationale suspend ses émissions
Vendredi 18 août Les journaux ne paraissent plus, grève des PTT, le colonel Rol-Tanguy
Proclame la mobilisation par voie d'affiches
Samedi 19 août Premiers combats de l'insurrection, occupations des mairies des
Ministères et des sièges des journaux, occupation de la préfecture de
police
Premières contre-attaques allemandes dans l'après midi
Dimanche 20 août Nombreux combats de rues, occupation de l'Hôtel de Ville, négociations
en vue d'une trêve
Lundi 21 août Malgré la trêve les combats continuent, le général Leclerc envoie
un élément précurseur vers la capitale, mise en vente des premiers
journaux de la libération, premières barricades
Mardi 22 août Les combats de rues atteignent leur intensité maximale
Mercredi 23 août Incendie du Grand Palais, Radio-Londres annonce prématurément la
Libération de Paris, la 2ème Division BLINDÉE s'ébranle vers la capitale
Jeudi 24 août Les combats de rues se font moins nombreux, la 2ème Division BLINDÉE se
heurte aux défenses allemandes dans le Sud de Paris, dans la soirée le
Capitaine Dronne atteint l'Hôtel de Ville
Vendredi 25 août La 2ème Division BLINDÉE entre dans Paris et avec l'aide des F.F.I
entreprennent la réduction des points d'appui allemands, le général von Choltitz, Commandant du Grand Paris, signe la capitulation à la Préfecture de police, le général de Gaulle rejoint le général Leclerc à la gare Montparnasse
Samedi 26 août Acclamation du général de Gaulle de la Place de l'Étoile à la cathédrale Notre Dame, fusillade sur le parvis, dans la nuit la Luftwaffe effectue un raid vengeur
Dimanche 27 août La 2ème Division BLINDÉE se porte au Nord de la capitale pour empêcher un retour offensif des Allemands.
Les femmes portaient des jupes légères et les hommes portaient des chemises à manches courtes
Les Parisiens ne s'embarrassent pas de leurs papiers d'identité. Cela expliquera le nombre de victimes non identifiées et enterrées sous la simple épitaphe Inconnu mort pour la Libération de Paris.
Août 1944
Depuis le débarquement du 6 juin 1944 en Normandie, les Parisiens suivaient attentivement la progression des Alliés et les divers organismes de la Résistance les incitaient à manifester. Le 6 août, ils avaient entendu l'appel au combat lancé par le général de Gaulle, président du gouvernement provisoire de la République, qui, dès le 18 avril 1942, avait affirmé que la libération de Paris devrait se faire par les armes de la France. Les services allemands commençaient à quitter la ville.
Convoi de prisonniers allemands autour de la place de l'Opéra le 25 août 1944.
Paris, ensoleillée et sous-alimentée, mettait en présence quatre forces: Les Allemands, commandés depuis le 9 août par le général von Choltitz. Installé à l'hôtel Meurice, rue de Rivoli, ses moyens, en hommes et en matériel, étaient relativement limités. Les partis collaborateurs (R.N.P. de Déat, P.P.F. de Doriot, etc.). Ils renoncèrent vite à se battre et prirent la route de l'Allemagne. La Résistance, où agissaient plusieurs acteurs. Le gouvernement provisoire de la République, d'essence gaulliste et siégeant à Alger, était représenté par un délégué, A. Parodi dont l'adjoint militaire, le général Chaban-Delmas, dépendait du général Koenig, commandant en chef des F.F.I. Le C.N.R., présidé par G. Bidault, rassemblait les principaux mouvements, partis et syndicats. Le C.P.L. d'A. Tollet, majoritairement communiste, couvrait tout le département. Cette situation se reflétait dans les commandements : ainsi, Rol-Tanguy commandait les F.F.I. de la région parisienne, dont faisaient partie les F.F.I. de la Seine placés sous les ordres d'un officier de carrière, le colonel de Marguerittes dit Lizé. - Les armées alliées, qui avançaient alors en Bretagne et en Mayenne. Il n'entrait pas dans leur plan de s'emparer de la capitale française, mais de la contourner et de poursuivre l'ennemi. Malgré le manque d'armes, ce fut la stratégie d'insurrection immédiate qui força les réticences de la délégation du gouvernement provisoire.
Évacuation d'un blessé, place de l'hôtel de ville.
Le 7 août, un ordre général de Rol-Tanguy mobilisait les chefs de secteurs et le 10, le comité militaire national des F.T.P. lança un ordre d'insurrection. Venu à Paris, Laval, chef du gouvernement de Vichy, tentait en vain de réunir l'assemblée nationale faisant libérer à cet effet E. Herriot, président de cette assemblée en 1940. Le 11 août, les cheminots de l'agglomération parisienne entamèrent une grève qui s'étendit rapidement tandis que l'état-major parisien F.F.I. allait s'installer dans les souterrains de la place Denfert-Rochereau. Le 15 août la C.G.T. lança la grève générale. La police entra en action : apport important, pour la Résistance, d'hommes armés, elle fit aussi figure de force stable et contrôlée au milieu de l'insurrection. A leur tour, les postiers se mirent en grève, suivis des ouvriers de la presse, des employés du métro. Alors qu'une fièvre libératrice gagnait Paris, un dernier train partait la nuit de la gare de Pantin, emmenant en déportation près de 2 400 personnes. Le 17, la police libérait les détenus politiques, arrêtait le préfet de police Bussière. A Paris et en banlieue, la résistance attaquait les Allemands, les miliciens. Les rues voyaient passer des véhicules fuyant vers l'est, emmenant services allemands et collaborateurs français, meubles et objets pillés. Çà et là montait la fumée des archives qui brûlaient. L'état-major F.T.P. lança son appel à la lutte décisive. Au C.N.R., l'opportunité d'une insurrection fut discutée avec le C.O.M.A.C. Le lendemain, 4 000 policiers se pressaient devant la Préfecture de Police, en civil, munis de brassards tricolores. En banlieue Est, des F.T.P. prenaient d'assaut la mairie de Montreuil-sous-Bois.
Poste de surveillance et de tri FFI dans l'enceinte du portail de l'hôtel de ville.
Le 18, le colonel Rol-Tanguy lança l'ordre d'insurrection. La préfecture de police était occupée, tout comme de nombreuses administrations, et, à 10 h, Rol-Tanguy y donnait ses ordres avant de rejoindre son P.C. de la rue de Meaux (19e). Retourné à la préfecture, il vit le préfet de police désigné par le gouvernement provisoire, Luizet, et Alexandre Parodi, qui plaça sous ses ordres les forces de police, de gendarmerie, de la garde républicaine. Les combats éclatèrent. Aux yeux des Allemands, Paris constituait un nœud de communications vital : tous les ponts sur la Seine, depuis Rouen, avaient été démolis par l'aviation des Alliés, sauf à Paris et en banlieue. Or les troupes allemandes, en retraite du front de l'Ouest, devaient impérativement passer. Von Choltitz contre-attaqua donc.
A 15 h, un char canonna la préfecture puis se retira tandis que des attaquants à pied, dans le Quartier Latin, TIRAIENT contre des barricades, contre le P.C. du colonel Lizé et contre les policiers retranchés dans la préfecture. Chez les insurgés, le manque d'armes, de munitions, se fit très vite sentir et ils en prenaient aux ennemis abattus. Les drapeaux tricolores flottaient sur la préfecture, l'Hôtel de ville occupée par les F.F.I., l'Ile de la Cité était pavoisé. Le 20 août, par l'entremise du consul de Suède, Nordling, une trêve fut conclue avec les Allemands. Toutes ces journées et celles qui suivirent, les médecins, infirmiers, secouristes de la Croix-Rouge française se dépensèrent sans compter, en y laissant parfois leur vie, auprès des blessés qu'ils évacuaient vers les points sanitaires et les hôpitaux. Du 20 au 25, les Allemands attaquèrent les mairies du 17e, du 20e, de Neuilly (dès le 19 à 18h00). Les combats se déroulaient dans tous les arrondissements mais aussi en banlieue, à Nanterre, Suresnes, Aubervilliers, Ivry-sur-Seine, au fort de Rosny. Le 22, l'ennemi évacua le fort de Romainville après avoir abattu la centaine d'otages détenus. Tout au long de ces journées, les exécutions se poursuivirent dans la région parisienne : 35 le 17 août, 17 le 19 août, 39 le 20 août, etc.
Gare Montparnasse, le général de Gaulle accueilli par le général Leclerc et Rol-Tanguy, le 25 août 1944.
Le 21, le C.P.L. puis le C.N.R. décidèrent donc de rompre la trêve. Partout dans Paris les barricades se multiplièrent, dressées par une population déterminée. Parodi décida la reprise des combats. Aux abois, les Allemands TIRAIENT sans sommation sur les passants. Nombre de leurs véhicules étaient attaqués à coups de cocktails Molotov et les accrochages étaient fréquents. A l'Hôtel de Ville le C.P.L. s'installa. Harcelés, les Allemands se retranchèrent sur quelques points forts. Le plus important sur la rive gauche était le Palais du Luxembourg, le Sénat, hérissé de petits blockhaus et gardé par des chars. La veille, Rol-Tanguy avait envoyé le commandant Gallois rendre compte de la situation aux Alliés dont les troupes atteignaient maintenant Mantes-la-Jolie, Chartres, Fontainebleau. Le 21, grâce au chef F.F.I. de Corbeil, Gallois, accompagné du docteur Monod, atteignit les lignes américaines à Pussay (Seine-et-Oise). Au P.C. de la 3e armée U.S., à Courville (Eure-et-Loir) il rencontra Patton qui l'envoya à Laval (Mayenne) au Q.G. du 12e groupe d'armées U.S. où il exposa la situation au général Sibert, puis au général Leclerc. Sans en référer au commandement allié, Leclerc décida d'envoyer vers Paris, en éclaireur, un élément léger sous les ordres du commandant de Guillebon qui atteindra Trappes. Devant l'opposition du général Gerow, chef du 5e corps d'armée américain sous les ordres duquel la 2e D.B. était placée, Leclerc tenta de joindre le général Bradley, commandant le 12e groupe d'armées. Ce dernier était avec le chef suprême pour l'Europe, le général Eisenhower, auprès duquel intervenait le général de Gaulle. Finalement, le 22 au soir, la 2e D.B. reçut l'ordre de faire mouvement sur Paris, appuyée par la 4e D.I.U.S. Au même moment, dans la capitale, les Allemands contre-attaquaient depuis le Luxembourg, reprenaient la mairie du Ve. Le 24, la 2e D.B. fonçait. Ses groupements passèrent par Châteauneuf-en-Thimerais, Maintenon, Epernon (Eure-et-Loir), Rambouillet (Seine-et-Oise).
De violents combats eurent lieu à Palaiseau, à Champlan pour réduire des canons antichars, ainsi qu'à Toussus-le-Noble, Jouy-en-Josas, Clamart, Wissous, Croix-de-Berny, Fresnes, Antony. Massu et ses hommes atteignirent le pont de Sèvres où ils durent stopper à 21 h 30. Dans Paris, depuis la caserne de la place de la République (bastion de 1 200 hommes, 8 BLINDÉS, de dizaines de canons et de mitrailleuses), l'ennemi attaquait les barricades du boulevard Voltaire. En fin d'après-midi, un avion léger Piper, piloté par le capitaine Callet de la 2e D.B., survola la ville et son observateur, le lieutenant Mantoux, jeta dans la cour de la Préfecture de Police un papier lesté portant un message de Leclerc : "Tenez bon, nous arrivons". Au carrefour de la Croix-de-Berny embouteillé, le général Leclerc brusqua l'avance de ses unités, décidant d'envoyer coûte que coûte le capitaine Dronne à Paris avec quelques véhicules (3 chars et des half-tracks d'infanterie et de sapeurs). A la nuit tombée, par la porte d'Italie, entrèrent ainsi dans Paris les premiers soldats de la France libre, la «nueve» (9e compagnie du R.M.T.) composées en partie de républicains espagnols. Suivis des tanks Sherman du 501e R.C.C. Romilly, Montmirail, Champaubert, Dronne et son chauffeur Pirlian atteignirent l'Hôtel de Ville à 20 h 45. Le capitaine rencontra G. Bidault, Luizet, Chaban-Delmas. C.N.R. et C.P.L. se réunirent. La Radio française clama sur les ondes l'arrivée de la 2e D.B. Le bourdon de Notre-Dame résonna, tout comme les cloches de l'église Saint-Gervais.
Le 25, dès l'aube, toute la 2e D.B. entra dans Paris par les portes de Saint-Cloud, d'Orléans, de Gentilly, d'Italie. Leclerc passa porte d'Orléans, rencontra Chaban-Delmas place Denfert-Rochereau puis, par l'avenue du Maine, atteignit la gare Montparnasse où il installa son P.C. Le nettoyage systématique des ennemis cernés commença. Parallèlement, la 4e D.I.U.S. entrait dans Paris par la Porte d'Italie.
Au petit pont, les forces Leclerc en action, 25 août 1944.
Le 12e cuirassier était à Bagneux à 10 h 53, à 11 h 30 quai de Javel, à 11 h 57 à la Tour Eiffel où, à 13 h, les pompiers hissèrent le drapeau tricolore. A 14 h, Massu était à l'Arc de Triomphe, saluait le Soldat Inconnu puis attaquait l'hôtel Majestic, avenue Kléber, siège du haut commandement militaire allemand en France. L'Ecole Militaire, au Champ de Mars, fut assaillie par le capitaine Gaudet, ses tanks TIRANT sur toutes les fenêtres tandis que l'attaque à pied était menée par des éléments du R.M.T. avec deux sections de F.F.I. de l'Eure. Le char Montcornet, du 12e R.C.A., entra en tirant à l'intérieur de la cour d'honneur. A la fin du combat, les Français comptaient 5 tanks Sherman détruits pour 600 Allemands prisonniers, des dizaines de morts, trois fois plus de blessés. Le gros centre de résistance ennemi, autour du Palais Bourbon et du quai d'Orsay subit l'assaut des spahis, des cuirassiers, des F.F.I., des marins du R.B.F.M. ; parmi eux, l'enseigne de vaisseau Philippe de Gaulle. Le char Quimper fut détruit ; le Metz tenait sous son feu l'esplanade des Invalides. Dans le Ve, dès l'aube, les blockhaus du Luxembourg étaient pris par des éléments du R.M.T., du 501e R.C.C., aidés par les F.F.I. du colonel Fabien, avant que la 2e D.B. n'arrive en renfort pour détruire chars et canons. Par le boulevard Saint-Michel, les soldats de Leclerc gagnèrent l'Ile de la Cité, la Préfecture, passèrent sur la rive droite rue de Rivoli, avançant vers la Concorde et l'Opéra. Au Luxembourg, une garnison de 600 hommes se rendit. De 9 à 17 h se déroula le combat de la caserne de la République par les rues et les toits. Les défenseurs se rendirent le soir aux émissaires français et allemands. Dans le IIe, la Kommandantur de la place de l'Opéra était reprise vers 14 h 30. La bataille se développa autour des Tuileries. Place de la Concorde, le char Douaumont du 501e R.C.C. aborda un tank ennemi ; le chef de char, Bizien, fut tué. Rue de Rivoli se déroula l'attaque de l'hôtel Meurice. Les officiers, de La Horie, Karcher, Franjoux et leurs hommes, s'en emparèrent, capturant von Choltitz et son état-major.
A 16 h 30, le ministère de la Marine était conquis. Von Choltitz fut emmené à la Préfecture de Police où Leclerc s'entretenait avec le général américain, chef de la 4e D.I.U.S. qui, par la gare de Lyon, avançait vers Vincennes. Vers 16 h, le général allemand y signa l'acte de capitulation. Conduit à la gare Montparnasse, P.C. de la 2e D.B., il y signa l'ordre de cessez-le-feu et de reddition à transmettre à ses troupes.
Le général de Gaulle et le général Leclerc le 25 août 1944.
Peu après, Leclerc exposait la situation au général de Gaulle qui venait d'arriver. Il s'agissait pour ce dernier d'assumer sa légitimité et d'installer une nouvelle administration. Alors que les membres du C.N.R. et du C.P.L. l'attendaient à l'Hôtel de Ville, il gagna le ministère de la guerre où il reçut son délégué et le préfet de police. Ce n'est que vers 19 h qu'il se rendit à l'Hôtel de Ville, où il prononça un discours resté célèbre. Le 26, Paris connut une allégresse populaire indescriptible, fêtant les libérateurs. De Gaulle, à 15 h, salua le Soldat Inconnu puis, de l'Etoile, suivi des chefs de l'insurrection, des autorités civiles et des généraux français, descendit à pied les Champs-Élysées parmi une foule immense, et se rendit à Notre Dame où retentit un Magnificat.
Place de l'Etoile, départ de la descente des Champs Élysées. Au centre le général de Gaulle, à sa gauche le général Koenig, à sa droite les généraux Leclerc et Juin, 25 août 1944.
Sur le parvis de Notre-Dame on attend l'arrivée du général de Gaulle.
Installé au ministère de la guerre, de Gaulle reçut les chefs de la Résistance puis les secrétaires généraux exerçant les fonctions de ministres, affirmant ainsi la suprématie du Gouvernement provisoire reconnu par les Alliés le 23 octobre. L'ennemi, qui contrôlait toujours les routes de l'Est et du Nord-Est, risquait toujours de contre-attaquer : le soir même du défilé, 150 appareils de la Luftwaffe bombardaient Paris, causant 189 morts. Le lendemain, Leclerc lança le groupement Roumiantsoff sur Saint-Denis, Le Bourget, tandis que les groupements Dio et Langlade avançaient vers Montmorency et Gonesse. II fallut de violents combats, du 27 au 30 août, pour que Paris ne soit plus menacé. Le 2 avril 1945, la ville de Paris fut décorée de l'Ordre de la Libération.